Diplomatie : L’interminable crise franco-marocaine
Et si, cette fois, la fâcherie était plus profonde ? Le couple franco-marocain bat de l’aile et les crises bilatérales se succèdent avec, en point d’orgue, l’année 2022. Si un léger redoux est à relever en cette fin d’année, il ne semble pas suffisant pour dégeler les relations bilatérales. Car chaque camp accumule les ressentis depuis plusieurs mois. Tandis que les Français se plaignent de rumeurs d’espionnage de la part du royaume, celui-ci attend de son «ami» un soutien plus franc concernant la marocanité du Sahara. Et c’est justement en voulant ménager la chèvre et le choux que Paris hésite à s’engager sur ce dossier, contrairement à certains de ses alliés européens favorables au Maroc. Le Président Macron semble plus enclin à un rapprochement avec l’Algérie, rivale de plus en plus hostile au Maroc. Enfin, l’épisode de la «crise des visas», à travers lequel la France reconnait limiter l’octroi de visas Schengen aux ressortissants des pays du Maghreb, est venu exaspérer l’opinion publique marocaine. L’année 2022 incarne un changement majeur, celui des rapports de force entre les deux «amis».
Sahara : L’Espagne s’aligne sur le Maroc
Le 18 mars dernier, Madrid a publiquement annoncé son soutien au plan d’autonomie marocain, qu’elle considère désormais comme «la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution de ce différend». Un différent apparu il y a désormais presque 40 ans et le retrait espagnol du Sahara occidental. Madrid qui, par cette reconnaissance, clôt également un long chapitre de brouille avec le Maroc, semble enfin prendre ses responsabilités historiques d’ancien pays occupant. L’annonce historique a été faite par le Premier ministre socialiste Pedro Sanchez, qui, pour le Maroc et ses partisans, vient remédier à une anomalie historique. Ce faisant, Madrid rejoint la liste des grands pays occidentaux, comme les Etats-Unis, l’Allemagne ou la Hollande, qui pensent désormais qu’une solution au conflit du Sahara passe inévitablement par une autonomie régionale sous souveraineté marocaine. Au grand dam d’Alger et du Polisario, l’Espagne compte désormais comme un allié diplomatique primordial du Maroc. Un tournant dans l’histoire du conflit au Sahara.
Patrimoine : Le Maroc montre les crocs
Le patrimoine est désormais une affaire qui compte dans les plus hautes sphères de l’Etat. Il y a quelques semaines à peine, Rabat accueillait la 17ème session du Comité intergouvernemental de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Une grand-messe qui vient légitimer le rôle du Maroc et de sa capitale dans la question du patrimoine. Outre l’inscription de plusieurs volets du patrimoine marocain dans les listes de sauvegarde de l’organisation onusienne, l’occasion était belle pour montrer que le temps de la spoliation patrimoniale est révolu. Plus tôt, le Maroc avait contesté l’utilisation de motifs avec du zellige, apparus sur le maillot de la sélection algérienne de football. Une situation que les plus hautes autorités veulent désormais éviter, à commencer par le roi Mohammed VI qui a annoncé «la création d’un Centre national pour le patrimoine culturel immatériel». Car, poursuit-t-il, «dans un monde en rapide mutation, il est important que le patrimoine immatériel d’un pays contribue à son rayonnement».
Climat : Sécheresse historique et stress hydrique
Au cas où l’affaire n’est pas encore prise au sérieux, le roi Mohammed VI a décidé de s’en charger personnellement. En octobre 2022, dans son discours à l’occasion de l’ouverture de la session parlementaire, le souverain a pris son ton le plus grave. Il explique devant les députés que «la problématique de gestion des ressources en eau se pose avec d’autant plus d’acuité que le pays traverse la période de sécheresse la plus intense qu’il ait connue depuis plus de trois décennies». Que faire face à une des plus grosses catastrophes climatiques de l’histoire contemporaine du pays ? Le roi précise d’abord que nous ne sommes pas les seuls concernés, du fait de l’impact mondial du réchauffement climatique. Plus concrètement, Mohammed VI révèle avoir promu un «Plan de lutte contre les effets de la sécheresse, des mesures d’anticipation visant à garantir la disponibilité de l’eau potable, à soutenir les agriculteurs, à préserver le bétail». Depuis, bien que la pluie soit venue soulager quelque peu l’intense stress hydrique, la sécheresse structurelle incarne bel et bien le plus grand défi pour l’avenir du royaume.