Le Maroc est sous double protectorat quand l’Europe s’apprête à affronter la Première Guerre mondiale. La Résidence générale, inquiétée par les influences de la Triple Alliance en terre marocaine, mandate, dans la plus grande discrétion, un espion chargé de surveiller la population pour le compte de la France.
Les déclarations de guerre fusent durant l’été 1914 en Europe, annonçant l’un des plus grands massacres de l’Histoire. Bien que le Maroc ne soit pas directement impliqué dans ce terrible conflit, la Première Guerre mondiale viendra bouleverser son fragile équilibre. Placé sous protectorat – depuis 1912 pour la France et depuis 1913 pour l’Espagne – le Royaume chérifien est tiraillé entre ces deux puissances. D’un côté, une France, partie prenante du conflit, de l’autre, une Espagne, certes neutre mais divisée en deux blocs opposés. En effet, le roi Alphonse XIII, la gauche et le mouvement ouvrier sympathisent avec la France et l’Angleterre, l’aristocratie et les militaires en revanche soutiennent l’Allemagne et l’Empire austro-hongrois. Des tensions qui ne présagent rien de bon pour la population marocaine prise en otage par les intérêts de deux pays européens. Par ailleurs, craignant un soulèvement généralisé contre un protectorat encore jeune, les autorités françaises accorderont une attention toute particulière à ces Marocains qu’ils savent rebelles. Mais comment faire avec le départ du gros des troupes françaises du Maroc, chargé auparavant d’assurer l’ordre et désormais envoyé en hexagone pour défendre la « mère patrie » ? Il faudra composer avec cette importante lacune. Le général Lyautey, Résident général à l’époque, sait qu’il doit faire face à plusieurs menaces provenant des représentants officiels et officieux des Etats en guerre contre la France. Nombre d’entre eux opèrent d’ailleurs à partir de Tanger, d’où ils seront rapidement expulsés, mais aussi du Maroc espagnol et du sud de la péninsule ibérique, où ils bénéficient de la complicité des autorités espagnoles.
Par Adnan Sebti
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