Le répertoire du conte marocain est riche mais fragile. Transmis à l’oral depuis des siècles, il met en scène des récits où se mêlent créatures fantastiques et animaux parlants. Comme avec «Les mille et une nuits», le narrateur prend chez nous une place prépondérante. Un rôle pris très au sérieux mais qui est, aujourd’hui, de plus en plus menacé. Bref aperçu de l’art du conte et du conteur…
Une foule de plus en plus compacte s’agglutine autour de l’homme tout de noir vêtu. Cheveux gris et barbe longue, il est l’un des conteurs les plus réputés de la place Jamaâ El Fna. Habitués, badauds et curieux forment désormais un cercle autour de lui. Une fois la «halqa» en place, le conteur entame son récit où le verbe haut se joint à un jeu d’acteur énergique. Au comble du suspens, au moment où l’intrigue du conte est à son paroxysme, l’homme arrête son récit. Pour lui, c’est le moment de la recette qu’il récolte en faisant sa ronde au centre de la halqa. Les pièces ainsi collectées, il reprend son récit pour l’épilogue final.
Une méthode qui fait penser au procédé utilisé par Shéhérazade, personnage central des «mille et une nuits». À la différence de notre Marrakchi, qui le fait pour des raisons pécuniaires, la reine de Baghdad tente, elle,de sauver sa vie. Mais au final, la moralité est que, ici comme ailleurs, raconter (et finir) des histoires, est une affaire très sérieuse.
Par Sami Lakmahri
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