Le PJD semble vouloir renforcer le processus d’arabisation de l’enseignement et de l’administration. le débat sur l’orientation linguistique du royaume fait rage. Pourquoi l’arabisation ne fait-elle jamais l’unanimité ?
C’est à l’occasion du nouveau cahier des charges réservé au secteur de l’audiovisuel public que le débat sur l’arabisation refait surface. Il y est question de consacrer plus de place aux programmes en langue arabe dans la grille offerte par les télévisions et les radios nationales. Une disposition qui n’est pas censée surprendre outre mesure puisqu’elle s’intègre logiquement dans l’idéologie du PJD. La confrontation a rapidement pris la tournure réductrice d’un face-à-face entre partisans de l’arabe et ceux du français. A croire que les deux langues représentent les seules alternatives pour une politique linguistique. Si le parti de Abdelilah Benkirane est un nouveau venu, le débat sur les bienfaits de l’arabisation ne date pas d’aujourd’hui. Depuis l’indépendance, l’Istiqlal a endossé le rôle de défenseur de la langue du Coran dans sa plus pure tradition. Malgré des échecs répétés, la volonté de certains politiques d’arabiser la société marocaine reste tenace. Ce projet est souvent présenté comme unique solution à ce qui devient un problème linguistique national. La difficulté du débat réside dans une sensibilité exacerbée car la question de la langue touche irrémédiablement à celle de l’identité du Maroc. C’est précisément sur ce point que le débat perd une partie de son sens. Qui sont les Marocains, et quelle serait la langue officielle qui leur serait la plus naturelle ? Autant de questions qui divisent et, par la même occasion, offrent un large éventail d’incarnations des valeurs véhiculées directement par les langues utilisées. Les différents courants linguistiques incarnés par les Amazighs, les partisans de l’arabisation, de la darija et les francisants, qui tous souhaitent imposer leur attachement à l’utilisation de leur langue, entrent régulièrement en conflit. Et ce n’est pas la dernière Constitution, qui a pourtant officialisé l’arabe et l’amazigh, qui va clore le débat. L’urgence est bien réelle car, souvent, l’échec de l’enseignement marocain est imputé à la cacophonie de la politique linguistique depuis l’indépendance. Un enseignement en crise qui peine encore à lutter efficacement contre l’illettrisme. Ici se pose le problème de l’accessibilité de la langue enseignée dans les écoles, également objet de réflexion pour les linguistes. Afin d’entamer la sortie de crise tant souhaitée pour le Maroc, il est devenu primordial de donner enfin une cohérence à la politique linguistique nationale.
Par Sami Lakmahri
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