À ses débuts, l’Islam au Maroc était pluriel : kharijisme, chiisme, mutazilisme et «berghwatisme» vivaient côte à côte dans un territoire divisé en plusieurs émirats. Mais peu à peu, un dogme réussit à prendre le dessus, devenant un socle du pouvoir en place. Comment un pays tiraillé entre courants hétérodoxes et rivaux a pu s’unifier autour d’une même école religieuse ? Coup de projecteur.
L’Islam marocain est malékite, ach’arite, soufi, trinité qui est le fondement de la doxa officielle du Royaume. Une doxa qui, selon le discours officiel, est née dès la naissance de l’Etat Marocain sous les Idrissides au VIIIème siècle, et dont le fondateur, un descendant de Ali et de Fatima (cousin et fille du prophète), a été le premier à le propager dans cette contrée lointaine qu’on appelait aux premiers siècles de l’hégire al-Maghrib al-Aqsa, le far west de l’époque. Les célébrations en grande pompe des 1200 ans de la fondation de l’état marocain en 2008 sont venus renforcer cette thèse, présentant le Maroc comme un état chérifien qui a choisi, depuis sa constitution, un islam du milieu. Un événement qui a donné à voir au public marocain et au Monde l’ancienneté et la continuité de l’état marocain, en faisant des Idrissides, notamment Idriss Ier et II, ses fondateurs et de Fès son premier centre. Ce récit, que tous les Marocains connaissent par cœur, ne résiste pourtant pas à l’épreuve de l’étude scientifique et historique, basée sur les sources de l’époque, dont une partie de la correspondance d’Idriss 1er, qui a été découverte et publiée par Abdelouahab Benmansour, historiographe du Royaume de 1961 à 2008, ainsi qu’à l’évolution de la recherche historique par le biais de l’archéologie, des inscriptions épigraphiques, des épitaphes et de la numismatique.
Par Mehdi Michbal
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