Fathallah Oualalou ne cesse de le répéter. Il s’est éloigné du monde politique et ne semble pas le regretter tant il déborde d’activités. Ces dernières années, l’ancien ténor de l’USFP se concentre sur la recherche, notamment en matière d’économie, son domaine de prédilection. L’ancien ministre nous explique dans cet entretien combien le monde change et livre des pistes pour que le Maroc «ne rate plus les trains du développement». Il évoque l’Histoire pour décrypter l’évolution de nos rapports avec les autres, l’Occident, l’Afrique, mais aussi la Chine dont il est devenu un spécialiste. Nous lui avons tout de même demandé de replonger dans les souvenirs du gouvernement d’alternance, un an après la disparition de Abderrahmane Youssoufi. Il est également question de Mehdi Ben Barka, dont il était l’un des plus proches. Pour le reste, Oulalou promet une future publication de ses mémoires, parmi les plus attendues de sa génération…
Vous nous accueillez au siège du Centre politique pour le nouveau sud (Center Policy for the New South), à Rabat. De quoi s’agit-il et quel est votre rôle dans cet institut ?
Lorsque j’ai quitté mes responsabilités politiques, je suis revenu à mes amours de jeunesse, à savoir le domaine de la recherche universitaire et scientifique. Au cœur de mes centres d’intérêt se trouve le phénomène de la mondialisation, auquel je réfléchis depuis le début des années 2000. C’est dans ce cadre que je me suis impliqué dans les travaux de ce Centre, qui est essentiellement marocain, et qui vise à développer un réseau avec d’autres centres de réflexions dans le monde, ce qu’on appelle désormais des think tanks. Dans ce centre, qui se concentre comme son nom l’indique sur les problématiques des pays du sud, j’occupe la fonction de senior fellow (chercheur principal).
Qu’est-ce qui a changé dans l’évolution des pays dit du sud par rapport au XXème siècle ?
Déjà leur appellation. À l’époque, on parlait du tiers-monde, voire des pays en développement. À l’époque des indépendances, cet ensemble était plutôt uni politiquement depuis la conférence de Bandung en 1955 (Indonésie). On y retrouve alors des pays importants comme l’Inde, l’Egypte, la Chine, mais aussi des représentations issues directement des mouvements de libération nationale. Le Maroc était d’ailleurs représenté par Allal El Fassi. Avec la décolonisation, il semblait donc que ce sud partageait les mêmes intérêts politiques face au reste du monde. Mais cette unité apparente s’est transformée en rupture économique à partir des années 1980, avec la montée en puissance des dragons asiatiques. La Chine, quant à elle, a entamé son décollage pendant la même période, pour devenir aujourd’hui la deuxième puissance économique mondiale. De même pour l’Amérique du sud qui, à mon avis, a profité de la présidence brésilienne de Lula pour émerger. Au final, le sud d’aujourd’hui peut se résumer à l’Afrique et à ce qu’on appelle le monde arabe.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’interview dans Zamane N°126