Si elle ne surprend personne, la réélection de l’ancien chef du gouvernement à la tête du PJD anime le débat et pose un certain nombre de questions. Un retour, donc, que l’on n’a pas fini de décrypter…
Le 27 avril 2025, à l’occasion du 9ème congrès national du Parti de la justice et du développement (PJD) à Bouznika, Abdelilah Benkirane a été réélu avec 947 voix (sur 1.402), soit 69,4 % des suffrages, il a devancé ses concurrents Driss Azami Idrissi (374 voix) et Abdellah Bouanou (42 voix). Cette réélection marque le retour d’une figure emblématique du PJD, ancien chef du gouvernement de 2011 à 2017, à la tête d’un parti en quête de renouveau après la défaite électorale de 2021. La réélection de Benkirane intervient dans un contexte difficile pour le PJD, qui a perdu plus de 90 % de ses sièges lors des élections législatives de 2021, passant de 125 à 13 députés. Cette débâcle a été attribuée à plusieurs facteurs, notamment la réforme électorale, la gestion gouvernementale et (surtout) la normalisation des relations avec Israël, une décision controversée au sein du parti. En reprenant les rênes du PJD, Benkirane a pour mission de redynamiser le parti et de restaurer la confiance des électeurs. L’objectif 2026, année électorale s’il en est, qui devrait conduire les islamistes au gouvernement ou, plus probablement, les maintenir dans les rangs de l’opposition. Pour séduire les masses et se refaire une virginité politique, Benkirane aura fort à faire. Personne, en effet, n’a oublié que la normalisation avec l’état hébreu a été scellée par un gouvernement conduit par le PJD. D’un autre coté, personne n’a oublié, non plus, la manière dont ce même Benkirane a été «éjecté» loin du gouvernement, voire de la scène politique, au moment de la crise pour la formation du gouvernement en 2017. Dès la confirmation de sa victoire interne, Benkirane a multiplié les sorties médiatiques avec un ton résolument offensif, donnant parfois l’impression d’être déjà en campagne pour 2026. Une agressivité qui laisse à penser que les prochains mois seront chauds et les empoignades à venir nombreuses. Plutôt qu’un programme ou un projet politico-social, le numéro un du PJD a préféré faire appel à des saillies verbales, parfois à la limite de la correction et de la décence, surfant sur des thématiques prévisibles (corruption/fassad, dilapidation des biens publics, soutien à la Palestine, etc.). Si la réélection de Benkirane a été officiellement saluée par le roi Mohammed VI, il reste que la stratégie du parti de la lampe, qui n’a jamais été aussi isolé politiquement, interpelle. Le congrès de Bouznika était un virage, pour ne pas dire un tournant. Pour se remplumer, les congressistes avaient le choix entre un retour en arrière (le choix Benkirane) ou la tentation de tourner la page en plébiscitant de nouveaux visages sans passif particulier. C’est la première option qui a été choisie : l’avenir nous dira si le PJD a vu juste ou pas. Les paris sont d’ores et déjà ouverts…