Ali Achour est un ancien ambassadeur marocain, curieux de l’activité de ses prédécesseurs. Il a donc consacré un ouvrage à la diplomatie d’autrefois. Exemples à l’appui, il révèle les coulisses d’un monde obscur où les missions diplomatiques étaient, comme aujourd’hui, un enjeu stratégique pour le pays. Il nous apprend que les envoyés du sultan n’étaient pas formés à cette tâche et qu’ils pouvaient même être illettrés. Que la plupart étaient des proches des sultans et que tous n’étaient pas forcément musulmans…
De par sa position géographique, de confluence, le Maroc a-t-il eu dans son histoire à faire un effort diplomatique accru par rapport à d’autres états plus isolés ?
Son emplacement géographique et ses richesses naturelles ont donné au Maroc une situation privilégiée. Méditerranéen et atlantique, africain et oriental, riverain du détroit de Gibraltar, l’empire chérifien a été un lieu de passage et de brassage, une passerelle entre plusieurs espaces. En particulier, la proximité avec l’Europe a été un atout majeur. Elle a permis de nouer des relations politiques, et de faire prospérer des échanges dans tous les domaines, en particulier le commerce. Le Maroc a reçu de nombreuses ambassades et en a envoyées lui-même auprès des autres souverains et chefs d’état. Le plus souvent, il s’agissait de signer un traité de paix ou de commerce, de nouer une alliance, de négocier la libération des captifs ou d’acheter des armes.
Ce voisinage a-t-il aussi été une source de tracas ?
On peut distinguer deux périodes dans l’histoire diplomatique du Maroc. L’époque faste de la puissance militaire et économique, qui a duré jusqu‘au début du XIXème siècle. La victoire sur les armées portugaises en 1578 à Oued el Makhazine et, plus tard, les lettres échangées entre le sultan Sidi Mohammed ben Abdallah et le président américain George Washington, en sont la meilleure illustration. Au début du XIXème siècle, donc, le Maroc a amorcé son déclin. D’une certaine manière, le pays était encerclé, avec un voisinage immédiat hostile : au nord l’Espagne, avec laquelle les conflits ont été fréquents; à l’est, les Ottomans ont essayé de soumettre le seul pays d’Afrique du Nord qui échappait à leur autorité. À partir de 1830 et l’occupation du territoire voisin par la France, les frictions ont été quasi permanentes, et le point culminant a été la bataille d’Isly. La guerre de Tétouan, en 1860, a achevé d’ébranler l’empire.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’interview dans Zamane N°125