Dans quelques semaines, l’espace culturel Sacré Cœur ouvrira ses portes à Casablanca. Le Parc de la Ligue Arabe, ainsi que les espaces environnants, verront une affluence sans précédent si la programmation est intéressante. Nous n’avons aucune information sur les contenus que compte proposer ce lieu majestueux restauré avec beaucoup de soin par notre ami l’architecte Abderrahim Kassou. Si les espaces sont bien définis, on le sait grâce aux différentes visites organisées par l’équipe de la restauration et de la mise en valeur, rien n’a encore filtré quant à la programmation. Qui va gérer le lieu, quel contenu artistique et culturel… ? Faudrait-il attendre la nouvelle direction de la ville ? Ce serait illustrer encore le sort de cette grande métropole qu’est Casablanca. Plusieurs chantiers attendent depuis bien longtemps, et notamment au niveau culturel.
Des espaces comme celui des abattoirs, de la salle Abdessamad Kenfaoui, la Coupole du Parc de la Ligue Arabe et bien d’autres attendent d’être ouverts au public. Les responsables communaux qui se sont succédés sur les sièges de la ville voyaient les urgences ailleurs. Comment se fait-il que des villes comme Rabat, Tétouan, Tanger, Agadir, Fès… ont leurs musées alors que la plus grande métropole du Maroc n’en a pas ?
Casablanca est un véritable centre d’art moderne et contemporain. Elle dépasse sur ce plan toutes les villes du Maroc réunies. C’est à Casablanca que le nombre d’œuvres d’art accumulées est le plus important, cela dépasse toute imagination. Entre les collections institutionnelles et privées, il y a de quoi monter plusieurs musées et non pas un seul. C’est à Casablanca que le nombre de galeries, de maisons de vente, sans compter les faussaires, les marchés parallèles, est le plus important. Tout cela se passe à Casablanca sans que cela attire l’attention des responsables politiques.
Heureusement que des âmes généreuses, surtout dans le secteur privé, pensent à participer au rayonnement de cette ville. Casablanca, que les autorités du pays avaient pensé emprisonner dans son image de ville d’argent, de négoce et de trafic, s’est lentement et surement, depuis la fin des années 1980, émancipée de cette image réductrice. Elle a grâce au secteur privé, surtout bancaire avant que d’autres (surtout l’immobilier) ne s’engagent dans la démarche, acquis l’image de la cité de la modernité sur le plan artistique et culturel.
Nous croyons savoir que des mécènes et des amoureux de l’art et du patrimoine s’apprêtent à doter la ville de quelques structures muséales. Si cela se confirme, ce ne sera que la concrétisation de ce qui, d’une manière presque clandestine, se passait depuis longtemps dans cette ville.
Il faut s’en féliciter, car si la tâche avait été laissée aux gestionnaires politiques de la ville, elle aurait donné quelque chose qui ressemblerait aux divers secteurs devant lesquels on voit les citoyens passer une journée pour le retrait d’un papier administratif.
Peut-on parler de la chance de la ville blanche ?
Par Moulim El Aroussi