Un cinéaste marocain se penche sur la période la plus noire de l’ancien règne, mais en rendant hommage à son père et aussi au cinéma. Le film, qui sort enfin en salles, mérite un triomphe.
Pour son premier long métrage, Adil El Fadili, déjà remarqué pour un court devenu culte («Courte vie», 2010), qui a fait le tour des festivals à travers le monde, n’a pas choisi la facilité. Il lui a fallu plusieurs années, longues et difficiles, pour venir à bout de son projet. Mais le jeu en valait la chandelle. C’est l’histoire d’un petit garçon dont le père disparait au cœur des années dites de plomb. La quête du père sert de prétexte pour plonger le spectateur dans un univers forain au croisement des univers de Tim Burton et Jean-Pierre Jeunet. Même si la tristesse de la disparition est au bout, le film est traversé de passages féériques, fantaisistes, éclatants de beauté. Le réalisateur a poussé le luxe jusqu’à insérer la figure iconique du général Oufkir, ainsi que d’autres détails liés aux années de plomb. Mais la réussite de ce beau long métrage, qui a tout gagé lors du FNF (festival national du film) en 2023, tient aussi et surtout à la séquence émotion qui le parcourt de bout le bout. Dans le rôle du méchant, en effet, Adil El Fadili a choisi de filmer son propre père, le regretté Aziz El Fadili, lui-même disparu en 2021 et dont ce fut le dernier rôle au cinéma. Ce n’est pas un hasard si le film s’appelle «Mon père n’est pas mort», qui résonne comme le cri du petit garçon dans le film, et celui du réalisateur dans la vraie vie. Un beau film qui vient enfin de sortir dans les salles du royaume, et qui mérite d’être vu par le plus grand nombre.