Neuf mois après son ouverture, le procès des membres du Hirak entame son troisième acte : l’audition des témoins à charge et à décharge. Le point sur un feuilleton judiciaire qui s’enlise.
Un an après avoir été placé en isolement à la prison d’Oukacha à Casablanca, Nasser Zefzafi a entamé sa deuxième grève de la faim, le 23 mai dernier. Jugé en première instance à la Cour d’appel de Casablanca depuis mi-septembre dernier avec 53 autres co-accusés, le leader du Hirak du Rif entend protester contre les « traitements inhumains » subis en prison. Sa famille ainsi que onze autres prisonniers ont décidé de le suivre. Dans la foulée, le 27 mai, le comité de soutien du Hirak a organisé un sit-in pour appeler à la libération des détenus et protester contre «l’iniquité du procès». La défense évoque elle aussi des «détentions arbitraires» et des «dossiers vides». Ce procès-fleuve, aux multiples rebondissements, s’est ouvert il y a maintenant neuf mois. Le 15 mai, il a entamé son troisième acte avec la venue à la barre des témoins à charge et à décharge. Auparavant, les 54 accusés, dont Nasser Zefzafi, ont été auditionnés. L’audience de ce dernier aura fortement marqué les esprits. En plus de rejeter toute intention séparatiste, Zefzafi a dénoncé un «procès politique». Poursuivi notamment pour «atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat», il risque, en théorie, la peine capitale; même si celle-ci n’est plus appliquée depuis 1993. Le verdict final, lui, ne sera pas rendu avant des mois. En parallèle, même si la médiatisation est moindre, au moins 170 personnes attendent encore d’être jugées à Al Hoceïma et une dizaine à Nador. Pour l’instant, 52 prévenus ont écopé de peines de prison ferme ou avec sursis. Un mineur de quinze ans, accusé d’avoir participé à l’incendie d’une résidence de police à Imzouren, a notamment été condamné à 20 ans de prison ferme. À quelques semaines de la fête du trône, l’attente est grande. L’année dernière, Mohammed VI avait gracié 1.178 personnes, dont « plusieurs dizaines de détenus du Hirak », mais les leaders du mouvement n’étaient pas concernés. Autre interrogation, et non des moindres, les requêtes socio-économiques de nombreux Rifains seront-elles prises en considération ?