Tels qu’ils se présentent, les événements au Proche-Orient montrent beaucoup de similitudes avec la guerre de l’Indochine. En fait, les états-Unis avaient vite décidé, après la victoire des alliées pendant la seconde guerre mondiale, d’aller tuer le communisme naissant dans les pays du Levant. La France avait déjà maintenu la guerre aux portes de la Chine où venait de se produire une révolution grandiose, balayant des régimes que les communistes de Mao Tsé Toung qualifiaient de valets du capitalisme. Au début, les Américains observaient et fournissaient de l’aide et du matériel de guerre, mais ils allaient s’impliquer progressivement. Leur peur a été renforcée par la guerre de Corée de 1950 à 1953. En 1954, les Accords de Genève mettaient fin à la guerre d’Indochine française, divisant le Vietnam en deux au niveau du 17ème parallèle: le Nord communiste, dirigé par Ho Chi Minh, et le Sud soutenu par les États-Unis et dirigé par Ngo Dinh Diem. Le souci des Américains fut au départ de stopper l’effet Viet Minh, la «ligue pour l’indépendance du Vietnam» fondée par Ho Chi Minh. Ils sont venus donc en aide au gouvernement sud vietnamien allié de l’Occident. Cela se basait sur une philosophie développée par le Président américain Dwight D. Eisenhower : la théorie du domino. Eisenhower croyait que la domination communiste d’un pays entraînerait la chute de ses voisins. Cette idée a justifié l’engagement américain pour empêcher la propagation du communisme en Asie du Sud-Est.
Le successeur d’Eisenhower, John F. Kennedy en 1961, allait augmenter le nombre de conseillers militaires américains de quelques centaines à environ 16.000, sans implication directe dans les combats. La situation était tendue et on n’attendait plus qu’un incident, aussi simple soit-il, pour engager les troupes US dans une guerre des plus meurtrières menées par les Américains. Ce qui arriva en août 1964 quand deux destroyers américains sont prétendument attaqués par des torpilleurs nord-vietnamiens dans le golfe du Tonkin. Le scénario est connu, le Congrès américain adopte une résolution du nom du golfe du Tonkin, donnant au président Lyndon B. Johnson des pouvoirs étendus pour utiliser la force militaire au Vietnam sans déclaration formelle de guerre. Une fois engagé dans la guerre, et une fois avoir perdu des soldats et ramené des cercueils au pays, aucun président ne pourrait cesser la guerre sans venger les combattants de la nation.
Des esprits éclairés avaient aperçu le danger de l’implication américaine dans cette guerre et la possibilité d’une défaite. Les premiers étaient Ho Chi Minh et le général Giap. Ce dernier en particulier, avait déjà démontré la capacité des Vietnamiens à vaincre une grande puissance coloniale à Diên Biên Phu (1954). Il savait que la guerre asymétrique mais le soutien populaire leur donnerait un avantage contre les Américains. Par ailleurs des hommes politiques américains, le sénateur J. William Fulbright ou les manifestants et les activistes anti-guerre, des étudiants, intellectuels et activistes pacifistes aux États-Unis, qui dès le début des années 1960, avaient exprimé leur opposition à l’escalade militaire. Des hommes de terrain : les journalistes et correspondants de guerre, des reporters tels que David Halberstam du New York Times et Neil Sheehan qui avaient rapidement identifié les difficultés que les Américains allaient rencontrer au Vietnam ou encore les analystes de la CIA et certains conseillers militaires. La machine de guerre n’écoutait que ses bottes et avançait aveuglément.
Le Proche-Orient présente aujourd’hui des similitudes avec l’Indochine de 1960. Crainte des Américains pour un effet domino du côté iranien ; aide massive pour Israël et engagement des conseillers, guerre des détroits et des passages maritimes, accumulation de force de destruction dans la région et mobilisation d’énormes machines de guerre…
L’inconnue : le prétexte de l’implication et les personnalités telles que Ho Chi Minh et Giap.
Qui sont-ils ou qui seront-ils ?
Par Moulim El Aroussi, conseiller scientifique de Zamane