A partir de 1912, deux «Frances» affichent des intérêts divergents au Maghreb. D’un côté le «département d’Algérie» voudrait continuer à étendre son influence vers l’Ouest et l’oriental marocain, et de l’autre, le nouveau Protectorat qui siège à Rabat tente de sauvegarder un semblant de souveraineté du Makhzen. Le premier Résident Général, Hubert Lyautey, n’a pas intérêt à voir l’empire chérifien s’émietter. Il en va du bien-fondé de sa politique «bienveillante» à l’égard du Makhzen. Pour lui, la légitimité du sultan est une priorité absolue et le voir se faire amputer des parties de ses terres est un mauvais signal. Dès lors, l’oasis de Tindouf devient le symbole de cette lutte inter-coloniale. Au cours des premières années du Protectorat, Lyautey essaye de maintenir un statu quo frontalier, stabilisant ainsi un tracé qui demeure tout de même flou. En février 1923, les deux parties organisent une conférence dans la ville de Midelt pour décider de l’administration coloniale de ses vastes territoires désertiques. Il y est décidé d’une collaboration effective et de tracer une ligne délimitée par les villes de Tinjoub, Oudika, Sotbi, Berda et Tindouf. Cette dernière est alors intégrée à l’autorité de la police algérienne. Pour la première fois de son histoire, la cité a une «nationalité». Ce découpage, d’apparence anodin, puisqu’il ne concerne que des autorités coloniales françaises, revêt bien plus tard une importance géopolitique majeure. Mais en attendant, Lyautey continue, jusqu’à son éviction du poste de Résident Général en 1925, de réclamer un tracé explicite des frontières, et délimiter ainsi les territoires marocains. Pour lui, si Tindouf est sous contrôle algérien, il n’en demeure pas moins convaincu de son rattachement au Makhzen comme il l’écrit dans une note destinée à son ministère de tutelle en 1924 : «L’histoire des dynasties marocaines suffit à démontrer que, de tout temps, les sultans ont exercé sur cette partie du continent une action spirituelle et, parfois, effective incontestée». De l’autre côté, Théodore Steeg, gouverneur général de l’Algérie et, ironie du sort, successeur de Lyautey au Maroc, est partisan d’un marquage laxiste. Pour lui, il est inutile de procéder à un traçage rigoureux puisque tout est finalement sous contrôle d’une même puissance, la France. Or, lorsque les indépendances semblent inévitables, Tindouf redevient maudite…
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