C’est historique. Près de 25.000 objets du patrimoine marocain ont été remis au royaume par les autorités françaises, au cours d’une cérémonie très officielle le 15 octobre dernier. 15 ans après avoir quitté le territoire, ces pièces refont le chemin inverse. Une opération spectaculaire qui promet une nouvelle ère. Une bien mauvaise nouvelle pour les trafiquants de patrimoine…
Quinze ans ! Il a donc fallu tout ce temps pour boucler une opération d’une envergure jamais connue auparavant dans le domaine du patrimoine. D’ordinaire parent pauvre de la lutte contre les trafics illégaux, celui qui touche le patrimoine vient de changer de dimension. La preuve par la cérémonie solennelle organisée au Mucem de Marseille pour la restitution d’un véritable butin au Maroc. Policiers, enquêteurs et officiels français y ont remis officiellement aux représentants marocains pas moins de 25.000 objets archéologiques pillés dans les terres du royaume. En poids, cela représente près de trois tonnes. Dans ce lot exceptionnel, il est mention de centaines de fossiles d’animaux préhistoriques, et même des gravures et des plaquettes réalisés par des hommes du néolithique. Un patrimoine scientifique inestimable, à l’heure où les chercheurs ne cessent de confirmer que le Maroc est pour eux un véritable eldorado. Une richesse dont la valeur est depuis des décennies bien évaluée par les trafiquants de patrimoine, qui ont toujours eu un coup d’avance sur les autorités. Mais les choses changent peu à peu, et la nécessité d’une collaboration internationale paraît de plus en plus indispensable. La mise en scène du Mucem vient le confirmer. C’est à cette occasion que les enquêteurs français ont narré le récit du butin marocain.
À l’AFP, Guy Jean-Baptiste, directeur régional des douanes de Marseille, explique que les trafiquants interpellés en 2005 et 2006 à Marseille et Perpignan, étaient à bord de «voitures haut de gamme». Il détaille les profils de ces derniers expliquant avoir eu à faire à «des gens bien sous tous rapports, des connaisseurs car les objets étaient traités, lavés». Après plusieurs procédures judiciaires, les trafiquants s’en sortent finalement avec des amendes d’un montant total de 120.000 euros. Une somme sûrement pas assez dissuasive. Mais pour l’heure, l’important est la restitution d’un patrimoine unique qui, d’habitude, se perd dans les limbes d’une économie souterraine. Du côté marocain, on se félicite évidement de ce coup de filet sans s’étonner de ce genre de dénouement. Toujours à l’AFP, Youssef Khiara, directeur national du patrimoine marocain, rappelle «que les autorités marocaines ont notamment formé la douane, les magistrats afin d’avoir des ressources humaines qualifiées pour faire face à ce fléau». Prochaine étape, l’élaboration d’une convention entre les deux Etats pour un meilleur traçage des trafics, mais aussi d’un assouplissement des procédures juridiques en vue des restitutions.