L’histoire de la dynastie almoravide est aussi celle d’une femme. Une beauté envoûtante doublée d’un esprit fin et d’une vaste ambition. Zaïneb Ennafzaouïa, en devenant l’épouse de Youssef Ibn Tachfine, a assuré la pérennité de son pouvoir.
Au début du XIe siècle, le Maroc vit un état d’éparpillement inégalable. La dynastie idrisside s’est désagrégée en une multitude de communautés et de principautés. C’est au cœur de cette instabilité que jaillit du fin fond du Sahara un mouvement vigoureux, qui affiche une volonté de réforme et d’unification. Cette nouvelle dynamique prend naissance au sein d’une tribu de la confédération amazighe Sanhaja. Il s’agit de la tribu Lamthouna, parvenue à unir ses rangs sous le commandement d’un homme, Yahia Ibn Ibrahim El Gandali. Ce chef ambitieux cherche un prédicateur pour prêcher le Coran. Il le trouve en la personne du malékite Abdellah Ibn Yacine. Avec lui, il fonde le mouvement almoravide. Ainsi naît la dynastie qui règnera sur le premier Etat indépendant du califat de l’Orient et s’étalera sur tout le Maroc. Une épopée qui n’aurait peut-être pas été possible sans le charme et la poigne d’une femme : Zaïneb Ennafzaouïa.
La belle de Nafzaoua
La documentation est loin d’être foisonnante sur les origines de Zaïneb, en revanche elle est plus bavarde sur ses mondanités. Zaïneb Bent Ishaq El Houari, selon quelques sources, serait originaire de la tribu Nafza, une tribu amazighe de l’est d’Ifriqiya. Sa famille habite la cité de Kairouan. Son père, Ishaq, commerçant de son état, échange ses marchandises entre Kairouan et Aghmat. D’après les chroniqueurs, Zaïneb est une belle femme, dotée d’une féminité singulière. Elle est convoitée par un nombre impressionnant de chefs de tribus, de notables et autres patriciens. Ce qu’elle ne trouve pas désagréable. Au contraire, elle se paie le luxe de refuser les avances des hommes modestes et recherche la proximité de ceux qui appartiennent aux plus hautes sphères. La beauté de son visage, l’harmonie de son corps et l’élégance de sa démarche la démarquent des autres femmes de son temps, mais c’est parmi les hommes que Zaïneb veut se distinguer. Elle participe à leurs conseils et à leurs causeries, où elle fait preuve d’une grande capacité d’analyse, de justesse de point de vue et de prise de décision. Son ambition s’affermit avec les prédictions qu’elle avance sur l’avenir de sa tribu et les recommandations qu’elle prodigue. On dit alors d’elle qu’elle est une kahina (sorcière) et que les jnouns sont à son service.
Par Lotfi Bouchentouf
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