Alors que la guerre est ouvertement déclarée contre le groupe «Daech», les regards se tournent vers les formations politiques qui usent du concept de «califat». Au Maroc, «Al Adl Wal Ihssane» doit-il changer sa rhétorique ? En face, les mouvements de gauche ne cachent pas leur inquiétude. Décryptage.
Dans les écrits de feu Abdessalam Yassine, une prédiction ne fait guère de doute chez les membres de la « jamaâ ». Après que le royaume du Maroc ait adopté un référentiel islamique pour sa gouvernance, il s’alliera aux autres pays similaires pour former le califat islamique. En juin 2014, Abou Bakr Al Baghdadi, dirigeant de Daech (acronyme en arabe du groupe «État islamique en Irak et au Levant») décrète le califat sur un territoire à cheval entre l’Irak et la Syrie. La brutalité de son action lui vaut une condamnation par l’ensemble de la communauté internationale et l’immense majorité des musulmans rejette en bloc son autoproclamation. Seulement, cet homme agit au nom de l’islam et prétend accomplir la volonté du Prophète, celle de rassembler la «Oumma» autour d’un seul et même califat. Bien que le procédé ne soit pas le même, il reste difficile de ne pas faire le parallèle avec les objectifs annoncés par Cheikh Yassine, fondateur de la «Jamaâ». C’est par ce prisme que les formations politiques progressistes d’obédience de gauche voient une menace en toute entreprise qui vise le ralentissement du processus séculaire marocain. Pour un parti tel que le PSU (Parti socialiste unifié), l’avenir ne peut se passer d’une transition démocratique dont le but est l’avènement d’un véritable État de droit, accompagné d’un confinement du religieux dans la sphère du privé. Ces deux projets pour la société marocaine sont radicalement différents, mais les deux groupes qui les véhiculent se retrouvent dans une même posture, celle de l’opposition. Ce n’est donc pas par hasard si les membres d’Al Adl Wal Ihssane ont été aperçus aux mêmes cortèges organisés par le Mouvement du 20 février en 2011. Aujourd’hui, Zamane prend le pari de mettre, face à face, les deux extrêmes d’un même échiquier politique. Ces derniers confrontent leurs divergences, mais aussi leurs similitudes.
Propos recueillis par M. Bouaziz, S. Lakmahri, et M. Monjib
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