Au moment d’entamer la dernière décennie du XXe siècle, la presse marocaine est à bout de souffle. La crédibilité des supports proches des partis s’est effritée et un renouveau militant semble nécessaire. C’est alors que la presse dite indépendante fait son apparition.
Le long règne de Hassan II a considérablement affaibli le « quatrième pouvoir ». La presse virulente affiliée aux partis politiques des années 1960 n’est plus qu’un vague souvenir. Une fois les partis d’opposition domptés par le régime, la presse s’est retrouvée dans l’incapacité de peser sur le champ socio-politique du pays. Entre-temps, le monarque a été pointé du doigt par la communauté internationale pour ses graves manquements aux règles élémentaires de la démocratie, notamment en ce qui concerne la liberté d’expression. A l’intérieur du pays, un renouveau de la conscience politique est en marche et l’opposition reprend espoir. Pour capitaliser sur une probable nouvelle ère, de nouveaux acteurs comptent peser pour obtenir de réels changements. Parmi eux, des journalistes. La presse non affiliée à des partis politiques voit le jour, elle est dite indépendante. La démission de la presse partisane de son rôle d’information est l’indicateur adéquat du déclin des partis politiques marocains. En somme, les partis de tous bords utilisent leur presse écrite comme moyen de communication entre eux ou avec le pouvoir, reléguant l’intérêt pour le lectorat au second plan, comme l’explique Khalid Jamaï, ancien rédacteur en chef du journal L’Opinion, affilié à l’Istiqlal : « En près de 35 ans de carrière dans ce journal, nous n’avons jamais organisé de sondage pour satisfaire les besoins du lecteur ». A la déroute de ce type de presse, s’ajoute un mal profond que même les pays voisins ont réussi à éviter : le cruel manque de lectorat. Au-delà du faible taux d’alphabétisation, les Marocains délaissent largement les kiosques et ne lisent que très peu de journaux. Ces derniers leur rendent tristement la pareille en ne consacrant aucun effort à répondre à leurs attentes.
Par Sami Lakmahri
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