A peine connu comme étant le père de la presse marocaine, Saïd Hajji a pourtant laissé derrière lui une œuvre que la mémoire n’a pas choisie de glorifier. Récit du parcours hors norme d’un génie précoce.
Saïd Hajji est venu au monde libre, un 29 février 1912. Certains auraient presque juré qu’il avait choisi de naître un mois avant que le Protectorat ne s’installe au Maroc, ce jour du 30 mars 1912. Cet heureux hasard va d’ailleurs l’accompagner tout au long de sa courte, mais prodigieuse existence. Une vie durant laquelle il allait sacrifier les trente années que lui a réservé son destin pour un combat épique, celui de la dignité et de la liberté.
A cette époque où la notion même de patriotisme marocain cherchait à inventer, Saïd Hajji développait déjà une conscience politique clairement en avance sur son temps. L’œuvre de ce visionnaire est le fruit conjugué de son talent brut et d’un environnement familial propice. Aidé par une fratrie éclairée, le jeune Saïd ne tarde pas à prendre son propre envol. Son enfance, il la passe à observer, analyser, comprendre. Comme il le dit lui-même, « il était de mon tempérament de ne rien apprendre dont je n’eusse d’abord bien compris le sens ». Ce mariage entre la passion et la rigueur scientifique agace au plus haut point un Protectorat qui n’était pas prêt à s’imaginer faire face à ce genre d’adversité.
Le militantisme chevronné de Saïd est d’abord une histoire de famille. Chez les Hajji, ce gène semble se transmettre à travers les générations. Son père, Ahmed, est un important notable de Salé. Attaché à ses traditions il reste néanmoins un pragmatique au service de l’administration. Par ses agissements, l’homme semble tout miser sur la prochaine génération, celle de ses enfants. La sienne est déjà sacrifiée sur l’autel de la colonisation. Lorsque son petit dernier, Saïd, atteint l’âge de la scolarité, Ahmed renonce au système éducatif proposé par les Français. C’est ainsi qu’accompagné de son inséparable grand frère Abdelkrim, Saïd Hajji rejoint les bancs de l’école coranique à l’âge de cinq ans. Plus tard, il ne se privera pas d’en critiquer les méthodes. Saïd a la chance de baigner dans une famille de lettrés. A sept ans, il suit des cours particuliers à domicile. Bien que sa soif de découvrir le monde extérieur est freinée par l’enfermement, sa fibre littéraire apparaît comme une évidence : « Je dois dire que la grammaire était la matière qui a le plus excité notre intérêt ». Son acolyte n’est autre que son frère Abdelkrim, avec lequel il forme un binôme d’une rare efficacité. Ensemble, ils se forgent une conscience militante qui conditionne très tôt leur destin de nationalistes. Une cause que les Marocains ne peuvent encore défendre qu’au sein des rares centres urbains éclairés. Salé en est l’avant-garde. Dès l’âge de 15 ans, Saïd va en faire son terrain de jeu.
Par Sami Lakmahri
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Qu’Allah lui réserve le paradis éternel ainsi qu’à toute sa famille..
Feu son père Ahmed Hajji était le frère de mon arrière grand-mère et donc feu Said Hajji était le cousin de ma grand mère paternelle.