En quatre années, le monde aura changé en profondeur. Vint le temps de l’incertitude, disait-on, mais c’est plutôt de désarroi qu’il s’agit. Le Covid, la guerre russo-ukrainienne, la guerre sur Gaza, celle israélo-iranienne. J’allais oublier la guerre éclair entre l’Inde et le Pakistan, ou celle entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie.
Le monde est moins sûr qu’on ne voudrait lecroire. Les décideurs, y compris des grandes puissances, ne peuvent voir plus loin que leur lorgnette, tellement le monde change, et ceux qui sont dans le commerce des idées sont désemparés. Ils n’ont plus de grille de lecture. Ceux qui s’en sortent sont les ingénieurs du chaos, qu’on ne voit pas, et qui mènent le monde avec leurs algorithmes et applications IA. On est passé de défis idéologiques à ceux existentiels, ce qui rend les choses plus compliquées. Notre monde est inquiétant et nous n’avons, pour conjurer le désarroi que cet appel pompeux à la vigilance ; mais que peut la vigilance contre l’ouragan ? Et l’espérance, qui est plus que l’espoir. Plus grands sont les dangers, comme dit le poète allemand Hölderlin, plus grand est ce qui nous sauvera. Laissons de côté ces grands défis existentiels de nature transversale, tels que le réchauffement climatique ou la menace nucléaire. Peut-on espérer une nouvelle configuration dans cette région chaude, qui est le Moyen-Orient ? Elle aura capitalisé, depuis la deuxième guerre mondiale, le plus grand nombre de guerres, et des plus meurtrières. Inutile de rappeler que son impact n’est pas circonscrit à son espace géographique. Naïf celui qui croira que la guerre à Gaza ne déteindra pas sur le monde et ne ravivera les tensions entre communautés, en Europe particulièrement, sans parler bien sûr de l’impact sur le cours des hydrocarbures. C’est par Gaza qu’il faudra commencer pour que le monde puisse reprendre un tant soit peu de sérénité. D’abord, la cessation des hostilités et la distribution des vivres. Le droit du peuple palestinien à disposer de ses droits légitimes est inaliénable. Croire qu’il pouvait en être autrement, c’est nourrir les hostilités, pour une autre génération. Une nouvelle donne se profile, celle que j’appelle la fin de la séquence de la révolution islamique iranienne, qui a contribué à la radicalisation, et même à la tension entre communautés religieuses. La fin de la séquence iranienne pourrait être porteuse d’espoirs.
On n’est pas prémuni de l’impact que peuvent avoir les tensions au Moyen-Orient. Le panarabisme, autant que l’impact de la révolution iranienne, ont déteint sur nous, et ont servi de carburant à la tension dans la région, en alimentant le conflit sur le Sahara. Les soit-disant militants du Polisario se voulaient la caisse de résonance du panarabisme, au début, puis un continuum des proxies de l’Iran. Le monde d’hier est derrière nous. Peut-il y avoir un monde de demain ? Nous sommes dans ce que la grammaire anglaise appelle le passé continu, et il n’est pas rassurant.
Par Hassan Aourid, conseiller scientifique de Zamane