Quand on évoque les grands caids, c’est au Glaoui, au Mtougui et autres notables du sud marocain qu’on pense. Or, le nord avait lui aussi ses grands caids, moins connus mais pas moins puissants et influents. Focus historique sur une grande figure du Makhzen au cours d’une période décisive de transition entre le XIXèmeet le XXème siècle, entre le «vieux Maroc» et le Maroc moderne du Protectorat.
Les Oulad Jamaâ appartiennent au groupement arabe des Ma’qil et ont servi en tant que tribu makhzen dès le XVIIème siècle. Situés au nord de la ville de Fès, ils ont constitué depuis longtemps avec les Hyaina, les Oudayaet les Cheraga un cordon militaire pour défendrela ville. Mais, en temps d’instabilité, ils pouvaient se retourner contre cette même ville. En tant que tribu guich, ils ont fourni à l’État de grands chefs militaires, mais aussi des ministres tels Mokhtar al-Jamai et Maâti al-Jamai, sous Moulay al-Hassan. La famille Baghdadi, de la même tribu, s’est surtout distinguée dans le commandement militaire. La famille Baghdadi commence son ascension sous le règne de Moulay Slimane, quand celui-ci nomma un des leurs comme caid des Beni Mguild. Il s’agit de Bouchta al-Baghdadi. Depuis, les sultans ont toujours eu recours aux services des Baghdadi. Ces derniers furent surtout des chefs militaires de grand talent, capables de mobiliser les combattants et de les engager dans des harkas là où le Makhzen en avait besoin. Les officiers de la Mission militaire française (1877-1912) ont pu observer ces chefs en action et témoigner de leur grande capacité d’encadrer des milliers de combattants. Peu de temps après son accession au trône, Moulay Hassan nomma ainsi Bouchta al-Baghdadi gouverneur d’Oujda en 1874. Ce gouvernorat était une distinction de taille pour lui, car cette ville-frontière constituait la première ligne de défense contre les ambitions territoriales de la France, sans cesse réitérées et gonflées par les maîtres français de l’Algérie.
Par Mohamed El Mansour
Lire la suite de l’article dans Zamane N°173