Au Maroc, la fin du Moyen-Âge correspond à la fin d’un âge d’or, une période propice à l’éclosion d’une spiritualité nouvelle, au sein d’institutions appelées zaouïas.
On le sait peu mais les zaouïas ont joué un rôle primordial dans l’histoire du Maroc. A la fois lieu de prière, de méditation et d’ermitage, la zaouïa est aussi une institution d’éducation, d’enseignement et de socialisation. Elle est un relais pour les voyageurs, un refuge en temps de famine, de disette et de guerres intertribales. En période de troubles politiques, elle est un sanctuaire inviolable, ouvert aux persécutés, et souvent base du jihad contre l’occupant chrétien des présides et des côtes. Les zaouïas ne sont pas une spécificité marocaine. Le monde arabo-musulman a connu semblables phénomènes, en particulier dans l’espace contrôlé par les Ottomans depuis le XVème siècle. Dans ces contrées, on parle plutôt de khanaqat et de takya. Les appellations changent mais les fonctions sont similaires. Il existe même des ressemblances entre zaouïas marocaines et monastères de la chrétienté au niveau de l’organisation et de la gestion du quotidien. L’ancêtre de la zaouïa au Maroc est le ribat ou rabitat. C’est, dans l’acception des hommes religieux et des Soufis, un territoire de spiritualité, un lieu de rassemblement des moujahidines pour organiser la défense de la terre d’islam et un espace de retraite pour les dévots en quête de recueillement et d’érudition. Parmi les ribat les plus anciens, la chronique retient ceux de Massa dans le Souss, Sidi Chiguer dans le Haouz de Marrakech, Salé, Tit sur la côte au sud d’El Jadida, Tanouten dans le Doukkala, Tasmat près de Marrakech, Anabdour près de Sijilmassa et la rabitat de Tamanghat sur la côte d’Anfa. Dans chaque ribat se trouvent un phare et une tour d’observation. On raconte à l’époque que la lumière des ribat balise le chemin des caravanes sur une distance d’environ deux mois de marche ! A cette fonction d’aiguillage, s’ajoute celle de contrôle des côtes et des itinéraires. En cas de danger, l’alarme est sonnée par les observateurs. Le ribat, ancêtre de la zaouïa, est déjà multifonctionnel.
Par Lotfi Bouchentouf
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