Comment sont-ils venus ? Comment ont-ils gouvernés ? Que savons-nous de la présence romaine au Maroc ? Ces questions, les chercheurs continuent de se les poser. Rachid Bouzidi, ancien conservateur du site de Volubilis, nous parle aussi de la vie à cette époque et retrace pour nous les grandes lignes d’une histoire antique que l’on a souvent tenté d’enfouir.
Depuis quand date l’intérêt de la présence romaine au Maroc ?
Chez nous, cet intérêt ne survient qu’avec les occupations coloniales au début du XXème siècle. Ce sont donc les Espagnols, et surtout les Français, qui entreprennent des missions de fouilles et de recherches dès les années 1910. Mais cette initiative n’est pas une démarche purement scientifique. Elle est aussi empreinte d’idéologie. Les Français justifient ainsi leur présence au Maroc comme une suite de l’occupation romaine des siècles avant eux. L’idée est de prétendre apporter la civilisation, le progrès et la paix, tout comme les Romains qu’ils considèrent comme leurs ancêtres. L’intérêt des Français sur le Maroc romain n’est pas seulement anecdotique. Lyautey, premier résident général, s’en est personnellement soucié. Les agents du contrôle civil étaient même habilités à déceler les traces de vestiges romains et de rapporter les informations à leur administration, qui savait déjà où chercher. Les explorateurs et historiens occidentaux du XIXème siècle, essentiellement le Français Charles Tissot, avaient délimité la présence romaine au Maroc et les contours de la Maurétanie Tingitane. Le tracé est un triangle entre, au Nord, Tanger et Tétouan, au Sud Ouest Salé, et à l’Est Volubilis.
Que devons-nous à la colonisation dans le domaine des découvertes et de la conservation des vestiges romains ?
Nous lui devons beaucoup. Quelle que soit leur motivation, ce sont bien les colons qui, les premiers, ont mis à jour et inventorié notre patrimoine romain. Evidement, tout n’est pas parfait. À Volubilis, par exemple, où le premier coup de pioche est donné en 1915, les techniques de conservation utilisées à l’époque manquent d’efficacité. Mais à leur décharge, ce sont les mêmes techniques utilisées partout dans le monde en ces temps. Certaines mosaïques ont été protégées en les plaçant sous une couche de ciment consolidée par du fer. Or, le fer est corrosif et la rouille est apparue 60 ans plus tard, ce qui a pour effet de dégrader certaines pièces majeures. Ceci étant, malgré ces lacunes inhérentes à l’époque, le travail effectué au début du XXème siècle a permis de sauvegarder l’essentiel de notre patrimoine romain, sachant qu’il est donc resté à l’air libre depuis cette époque.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’article dans Zamane N°110 (Janvier 2020)