La manière avec laquelle la France a reconnu que le présent du Sahara autant que son avenir, demeureront marocains, par une lettre du président français M. Emmanuel Macron, à SM le Roi Mohammed VI, puis les circonstances qui coïncident avec le 25ème anniversaire de l’intronisation du souverain, sont autant de balises sur une nouvelle ère dans les relations maroco-françaises. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette décision courageuse et sans équivoque. Elle conforte, en international, le rôle de la France sur l’échiquier du monde comme élément stabilisateur, et contribue à mettre fin à un conflit qui a trop duré.
Ici sur ses colonnes, on a toujours su gré à la France de son rôle aux côtés du Maroc dan l’affaire du Sahara, «la plus grande supercherie de l’histoire», selon feu Hassan II. Dans les moments de «brouille», on s’est refusé à entacher le passé ou à insulter l’avenir. On savait le rôle de la France depuis le déclenchement du conflit et dans les moments durs qui ont ponctué ce conflit. Toute vérité historique n’est pas forcément bonne à dire, avant terme. Mais arrive un moment où on ne peut rester dans le flou, et prisonnier dans un équilibrisme éreintant, et comme nous l’avons écrit, ici même, quand les choses vont sans dire, elles vont encore mieux en le disant.
Dans cette reconnaissance par la France, il n’y a pas que le considérant géostratégique, mais surtout la connaissance historique du dossier. La France connait mieux que quiconque l’histoire de ce grand espace qu’on appelait le Sahara Occidental, qui ne cadre pas avec la nomination que lui donne aujourd’hui les Nations-Unies, qui englobe une grande partie du Sahel. L’histoire évolue, et on ne peut pas revenir en arrière. Appuyer le Maroc dans son bien fondé sur le Sahara dit occidental, n’était, de la part de la France, que réparer de grandes injustices. Mais il fallait le dire sans équivoque, et la France l’a fait, désormais. Avec un style didactique qui lui est propre. Par un processus évolutif, dont l’ambassadeur, Christophe Lecourtier avait levé un voile, lors de la conférence qu’il avait donnée devant les étudiants de la faculté de Droit à Rabat un 21 mars de cette année, préparant en secret le printemps des relations maroco françaises.
Dans un monde en ébullition, le Maroc et la France pourront conjuguer les efforts, pour la paix et la sécurité, en Afrique, au Moyen Orient, contribuer, peut-être, à apaiser les tensions qui peuvent surgir en Hexagone. Nous avons besoin l’un de l’autre. Et dans cette nouvelle donne, nous devons forger un nouveau paradigme, de relations de pays pour des relations entre peuples.
Nous ne sommes pas prisonniers d’un prisme déformant, sur un atavisme colonial, et je suis, pour ma part conscient des «bienfaits de la colonisation», selon l’expression du regretté Jacques Chirac, tout autant que de ses travers.
Nous ne devons garder que le positif d’un passé enchevêtré, pour ne pas hypothéquer l’avenir. Et nous devons travailler ensemble, sur la sève des relations maroco-françaises, pour que celles-ci ne soient pas que l’apanage que de quelques élites, des milieux du pouvoir ou d’affaires. Elle se doit d’être humaine, trop humaine, par ce qui confère longue vie à des relations : à savoir l’aspect culturel. En «démocratisant» l’apprentissage de la langue française, dans nos écoles publiques, et pas que dans les missions culturelles, qui doivent être moins rédhibitoires, en multipliant les partenariats, en recourant aux «coopérants», dans nos établissements universitaires.
Dans les Invalides, key note speaker, M. Hubert Védrine, en mars 2018, invité par une association qui travaille sur le passé colonial, présidé par M. Frédéric Grasset, avait entrevu, avec appréhension l’avenir des relations franco-marocaines. Il n’avait pas tort, vu l’évolution culturelle que connaissait notre pays. Faisons en sorte que l’embellie au plus haut niveau, repose sur des bases solides, dans toutes les couches de la société. Le sang ne saurait redevenir eau, comme l’a dit l’ambassadeur de France, citant un proverbe marocain lors de la fête du 14 juillet à Rabat. On sait désormais qui est frère et qui ne l’est pas.
Par Hassan Aourid, conseiller scientifique de Zamane