La génération actuelle sera certainement surprise d’apprendre que l’un des grands hommes d’état marocains contemporains, était né à Attar dans l’actuelle Mauritanie, à l’image de ce grand militant de gauche originaire de Chinguetti, Mohamed Bahi Hormatollah, qui a autant marqué la gauche marocaine, voire arabe, que le journalisme.
Le cas de Dah (ou Dey) Ouled Sidi Baba n’était pas que le parcours d’un homme, riche de surcroît, mais le témoin d’une séquence décisive de l’Histoire du Maroc. Il aurait inversé la maxime de César : il vaut mieux être premier dans son village que second à Rome. Dah Ouled Sidi Baba aurait pu être premier à Nouakchott, mais il a choisi Rabat, ou plus exactement, il a choisi la fidélité à l’Histoire. Ce brillant juriste formé à l’école française, doublé d’une solide formation traditionnelle dans les medersas et mhadras (séminaires) de Chinguetti, a jeté son dévolu sur l’Histoire, plutôt que de tabler sur les vicissitudes de la politique. On ne refait pas l’Histoire, mais on ne peut l’ignorer non plus. L’aventure coloniale n’avait cure des êtres et de leur Histoire. On prend une règle, un équerre et on trace là où commande l’intérêt, ou là où s’arrête la portée du canon. Les minerais de fer de Zouerate valaient bien une messe. Le reste est du remplissage. Churchill se targuait d’avoir créé un état au Moyen Orient en un quart d’heure, «while he was taking his tea» (pendant qu’il prenait son thé). Il se trouve toujours des êtres prêts à plier aux desseins des puissants. Mais il se trouve aussi d’autres qui refusent d’y couler. Dah Ouled Sidi Baba a refusé le rôle déjà prêt que la puissance coloniale escomptait de lui en Mauritanie.
Par Hassan Aourid
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