Pendant tout le Moyen-âge, l’«extrême-Occident» a reçu de grandes vagues d’immigration volontaire ou forcée, occasionnant un brassage ethnique et culturel continu.
Le Maroc médiéval (entre la conquête musulmane, à la fin du VIIIe siècle, et la prise de Sebta par les Portugais en 1415) est loin d’être une province ordinaire du califat musulman, dont le siège est à Damas. Il est spécial à plus d’un titre : géographiquement il est très excentré, très loin du cœur oriental. Le commandement ne peut donc pas être direct, ni continu. Culturellement, les obstacles linguistiques et les modes de vie différents imposent un long processus de mutation. Politiquement, les pratiques autocratiques et brutales des walis arabes, nommés par les califes de l’Orient musulman, contrastent avec les coutumes des tribus berbères, rompues au « fédéralisme » et aux négociations continues. Tout cela va concourir à ce que cet espace de l’extrême-Occident soit un lieu réfractaire à l’ordre central du califat et un espace ouvert, voire accueillant, pour les courants islamiques contestant l’orthodoxie de l’Orient musulman. Ainsi les kharidjites, les zaydites, les sufrites ou les ibadites, persécutés en Orient, non seulement trouvent refuge au Maroc des IIIe et IXe siècles, mais y fondent des principautés.
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Par Mustapha Nachat
Professeur d’histoire médiévale marocaine à l’université de Oujda et spécialiste des relations maroco-italiennes au Moyen Âge.