Depuis toujours, la réforme de la Moudawana a mis l’état et la société marocaine en émoi. Retour sur l’épisode, resté fameux, de la fin des années 1980, opposant le défunt Hassan II et son ministre des Habous à la société civile et aux associations féminines…
Un livre venait de sortir à l’entrée littéraire de 1988, au titre un rien provocateur : «Le Harem politique» de la sociologue marocaine Fatima Mernissi. Le premier chapitre traite d’observations de l’auteure tirées sur le vif, suite à des questions posées au sieur Lambda. Florilège : «Acceptez-vous qu’une femme soit ministre ou haut responsable ? Oh, que non, dit-on à l’unisson. Et pourquoi ? Le Prophète l’avait interdit». Le propos sur lequel se reposaient les interviewées et leurs réflexions est apocryphe, ou plutôt faux. Voilà l’origine de l’ankylose des sociétés. Il faut dépoussiérer les textes par une lecture critique. Le livre ne passa inaperçu puisque le ministre des Affaires religieuses de l’époque, Abdelkébir Mdaghri, choisit dans sa causerie du mois de ramadan de rétorquer à la sociologue. Il ne mesurait pas les conséquences de son acte. C’était en mars 1989, le ministre des Habous, lors de la causerie religieuse au mois de ramadan devant HassanII, fit l’exégèse du propos prêté au Prophète, selon lequel une femme ne peut prétendre à la charge publique. Le propos est véridique, dit-il, et le ministre spécifia que la femme ne peut être ni ambassadeur, ni gouverneur, ni ministre. La causerie suscita un tollé général, que les partis de gauche et même l’Istiqlal surent mettre à profit. Le dernier jugea l’interprétation du ministre abusive et restrictive et appela pour avis d’autres oulémas qui dénoncèrent l’interprétation du ministre. Les partis de gauche et les associations féminines ne pouvaient agréer l’exégèse du ministre sur la base qu’elle s’oppose à la modernité. La chose prit une tournure insoupçonnée et devint un levier de contestation. Lors des festivités du 1er mai, le nom de Mdaghri fut conspué. Des comités s’organisèrent. Une action d’envergure est menée, qui avait pour thème de changer la Moudawana (ou code du statut personnel).
Par Hassan Aourid
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