Le règne du sultan Moulay Slimane (1792-1820) n’est pas ordinaire. Outre les rivalités politiques qu’il a du affronter, l’orientation religieuse rigoriste qu’il a choisie, les famines qui se sont abattu sur ses sujets, il s’est retrouvé deux fois prisonnier des tribus qui lui sont insoumises. Retour sur un fait historique peu banal…
« L’épisode a été rapproché du coup d’État manqué de Skhirat, lorsque les cadets de l’école d’Ahermoumou manipulés par les conjurés finissent par reconnaître Hassan II et l’acclament ». La comparaison rapportée par l’historien Daniel Rivet traduit l’ampleur du désastre qu’a vécu le sultan Moulay Slimane. En mai 1819, il affronte une coalition de tribus insoumises à son autorité, mais se fait capturer à l’issu de la bataille de Lenda. Il ne doit finalement la vie sauve qu’à son statut de chef religieux, de chérif, mais pas forcément à celui contesté de chef d’Etat. Comment un sultan si bien protégé est-il ainsi tombé entre les mains de ses ennemis ? Et pourquoi ces derniers l’ont-ils relâché si facilement ?
Les réponses à ces questions, les historiens vont les chercher dans le début de règne chaotique de Moulay Slimane et dans la nature du conflit qui l’oppose à certaines puissantes tribus. Dès le départ, le discret arrière petit-fils de Moulay Ismail s’efface de la lutte pour la succession de son père Sidi Mohamed Ben Abdellah (1757-1790), au profit de son frère Moulay Yazid (1790-1792). Ce dernier ne parvient pas à rétablir l’autorité du Makhzen sur tout le territoire, en proie à une grave instabilité depuis que ce souverain a décidé d’accentuer la pression fiscale en vue d’une vaine expédition pour reprendre Sebta, pourtant solidement défendue par les Espagnols.
Un échec prévisible qui ne rehausse pas le prestige de ce sultan, déjà pointé du doigt en tant que prince favori à la succession. «Surnommé al-Az’ar en raison de son teint blond qu’il tenait de sa mère irlandaise, il eut, en 1789, l’idée saugrenue de piller, à son arrivée à La Mecque, la caravane marocaine du Hajj (Rakb al-Hajj). L’affaire fit grand bruit et irrita si fort le sultan Sidi Mohamed qu’il renia publiquement son fils», précise l’historien Michel Abitbol dans son «Histoire du Maroc».
Par Sami Lakmahri
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