L’opération de redistribution des terres coloniales aux Marocains, entre 1972 et 1977, a été au centre d’un complexe jeu de pouvoir. Décryptage.
19 septembre 1972… Dans un discours considéré officiellement comme historique, Hassan II annonce une «révolution agraire» au Maroc. Le 3 mars de l’année suivante, le roi annonce au peuple, dans un discours à la nation et par le biais d’un dahir, la récupération de quelques centaines de milliers d’hectares de terres coloniales. Ces terres sont, en partie, distribuées aux paysans pauvres. Mais pourquoi avoir attendu dix-sept ans après l’accès du pays à l’indépendance pour annoncer une telle décision !
Ceux qui ont lutté pour l’indépendance, ceux qui ont résisté les armes à la main, comme ceux qui croyaient en la lutte pacifique, avaient depuis toujours revendiqué haut et fort une telle mesure. Car, celle-ci était perçue par les nationalistes marocains comme à la fois patriotique et éminemment civilisationelle. Sans réforme agraire, le Maroc ne pouvait espérer faire accéder la population rurale à la modernité. Autrement dit, les trois quarts de la population à l’époque.
Certes, le gouvernement Abdellah Ibrahim a procédé à la distribution de quelques milliers d’hectares à des familles de paysans. Il a aussi tenté, en 1959, de bloquer l’hémorragie –débutante- des transferts de propriétés coloniales à des particuliers marocains aisés. Mais dès son ascension au trône, Hassan II va encourager, au moyen de dérogations émanant du palais, le transfert desdites terres à des Marocains. Surtout des notables qui s’avéreront être les meilleurs soutiens de son régime. Des membres de la classe politique ou des fonctionnaires de l’Etat vont également en profiter.
Par Maâti Monjib
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