A l’approche du IXe congrès de l’USFP prévu à la mi-décembre, l’occasion est belle de sonder l’un des ses fondateurs. L’analyse et les confessions de Mohamed Lahbabi sont sans équivoques. L’USFP est à un tournant majeur de son histoire.
Quel regard portez-vous sur la manière de pratiquer la politique aujourd’hui?
Notre champ politique est complètement incohérent. Pourquoi existe-t-il 30 partis politiques dans un pays qui compte à peine plus de 30 millions d’habitants, alors qu’aux Etats-Unis, peuplés de plus de 300 millions d’individus, seul deux partis bataillent pour le pouvoir ? Je sais comment la plupart de nos partis ont été créés. Prenons l’exemple d’un dirigeant d’un grand parti politique qui voudrait être ministre. Lorsqu’il comprend que ça ne sera pas possible, il s’empresse de fonder une nouvelle formation politique. Mais quelle est son idéologie, son programme, sa vision de la société ? Réponse : aucune. Tant que cette mentalité prédomine, le politique au Maroc ne sera pas pris au sérieux. Mon ami Mohamed El Yazhgi a été emprisonné et torturé dans le passé. Après la démission de Youssoufi, il s’est engagé dans la course au secrétariat général de l’USFP. Nous étions tellement proches qu’il a commis l’imprudence de m’inviter à certaines réunions secrètes, au cours desquelles il complotait contre des membres de son propre parti. Ma déception a atteint son paroxysme lorsqu’il a déclaré publiquement, alors qu’il était ministre d’Etat : « Le Makhzen est mort ».
A propos de la façon dont se sont créés les partis, quelles sont les orientations qui ont donné naissance à l’USFP ?
En 1975, pendant le congrès extraordinaire qui a fondé l’USFP, nous avons dit à certains de nos amis partisans de l’action violente, comme Fqih Basri, que le parti devrait s’engager dans la lutte exclusivement politique et sociale. Nous avons rappelé que les temps avaient changé, et que les méthodes d’action, telles que nous les avions connues au milieu des années 1950, n’étaient plus d’actualité. La création de l’USFP dépendait beaucoup de cette volonté de n’engager le combat pour la démocratie que sur le terrain politique. De toute façon, nous avions compris depuis les révoltes de Dar Bouazza, en 1973, que l’armée nous avait définitivement échappé.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
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