La thèse du complot a longtemps accompagné la fin tragique, en pleine fleur de l’âge, du fondateur de Nass El Ghiwane, alors au sommet de leur popularité et de leur art. Mais qu’en est-il, réellement ?
Un soir de 1974, précisément le 26 octobre, une rumeur a traversé Casablanca, puis tout le Maroc : l’un des deux sopranos de Nass El Ghiwane, Boujemâa, dit Boujmii, est décédé. En réalité, la jeunesse avait tellement investi émotionnellement dans le groupe que beaucoup ont immédiatement cru à un complot. L’engouement pour Nass El Ghiwane aveuglait les fans et les poussait à leur attribuer une vision du monde que ses membres ne portaient pas nécessairement. On les disait la voix du peuple, on leur attribuait ce dont ils n’avaient peut-être pas conscience. La jeunesse révolutionnaire des années 1970 avait fait des projections quelquefois exagérées sur les chansons. On interprétait politiquement chacun des textes des chansons, même ceux à contenu franchement religieux ou mystique. Des spectacles délirants, proche des séances de transe des possédés, réunissaient des intellectuels et des politiques de gauche. Nass El Ghiwane étaient devenus, pour une certaine gauche, la musique officielle. En 2005 le parti de gauche (PSU), lors de son congrès qui se tenait sur les gradins du complexe sportif Mohammed V à Casablanca, a d’ailleurs ouvert les débats avec les chansons de Nass El Ghiwane en prélude. On retrouvait la voix du peuple dans chaque mot.
Par Moulim El Aroussi
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