Le gouvernement Benkirane semble hériter d’une situation économique pour le moins inconfortable. Entre réformes douloureuses et difficultés à tenir les promesses de campagne, l’Exécutif peinerait à joindre les deux bouts. Passé, présent et avenir d’un secteur clé qui prédit le devenir du Maroc…
L’exception marocaine s’applique-t-elle également au domaine de l’économie ? Longtemps otage de l’opacité politique, l’économie marocaine fait enfin sa mue. Depuis le début des années 2000, l’État surfe sur une courbe de croissance presque digne d’une puissance émergente. La presse vante la modernité de la finance nationale et fait échos d’investissements étrangers de plus en plus nombreux. Derrière cette image résolument moderniste, l’économie marocaine traîne néanmoins le volet social comme un boulet. À qui profite réellement cette apparente embellie ? En choisissant le modèle ultralibéral, le Maroc a-t-il tourné le dos à sa population la plus déshéritée ? Alors que les spécialistes prédisaient au royaume un avenir radieux, le gouvernement Benkirane se retrouve empêtré dans des difficultés qu’il n’osait même pas imaginer avant son investiture. Déficit budgétaire et endettement inquiétant sont autant de signes d’une fragilité qui ne dit pas son nom. Si, depuis l’avènement de la Constitution de 2011, de nouvelles règles de gouvernance sont souhaitées pour le pays, il semble que l’économie souffre encore de handicaps hérités d’un autre âge. Un système de corruption encore bien ancré, une économie informelle toujours aussi active et une fiscalité au service des plus puissants paralysent l’essor tant attendu. Les réformes engagées peuvent-elles prétendre à faire de l’économie nationale un moteur de développement ? Afin de mesurer les progrès réalisés ou les échecs maintenus, il est intéressant de regarder vers le passé afin de mieux comprendre l’avenir. Deux éminents spécialistes de la question confrontent, pour Zamane, leurs points de vue sur la question.
L’état actuel de l’économie marocaine était-il prévisible et comment en lire les indicateurs d’une manière efficace ?
Azedine Akesbi : On peut dire qu’aujourd’hui, nous avons plus de moyens en notre possession pour mesurer plus efficacement la performance de notre économie. La lecture des indicateurs économiques permet en effet d’avoir une base crédible pour évaluer les objectifs qualitatifs ou quantitatifs. Le développement et l’usage des indicateurs ont connu une évolution sans précédent au cours des vingt dernières d’années dans le monde. Avant, à cause de beaucoup de facteurs, la question de la reddition des comptes n’était pas vraiment posée, tout comme une approche stratégique en fonction des résultats de l’économie n’était pas non plus d’actualité. Concernant la question posée, disons que le Maroc a bénéficié, dès les années 2000, d’un taux de croissance relativement important. Toutefois, il reste limité par rapport à son potentiel et à ses besoins. De nombreuses études estiment qu’il faudrait une croissance annuelle moyenne de l’ordre de 7,5 % sur une longue période pour commencer à résorber le problème du chômage. Dans l’ensemble, je pense que la performance macro-économique du Maroc reste problématique. Nous avons par exemple un sérieux problème d’endettement, de déficit du budget et un déséquilibre structurel au niveau de la balance commerciale.
Par Sami Lakmahri
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J’aime beaucoup l’esprit de Zamane, décapant, pragmatique et proche des réalités sans sombrer dans l’idéologique.
On voit que ce magasine est imprégné par la culture de l’historien, analyste froid mais qui arrive à reconstituer une réalité « en couleur ».
Bon courage! Tbarkellah 3likoum vous faites vraiment très bien votre métier et donnez la parole à des gens intéressants!