Dans le Maroc pluriel, par ses communautés et ses religions, la justice ne pouvait être rendue de la même manière, vu les textes qui gèrent chaque communauté. Retour sur le cas particulier de la justice rabbinique, au temps du Protectorat.
Soumis au régime commun, comme leurs compatriotes musulmans, les citoyens juifs de l’Empire chérifien ne bénéficiaient d’aucune mesure exceptionnelle pour échapper au droit pénal. Mais en raison de leur religion, les sultans du Maroc, s’appuyant sur le droit musulman, avaient accédé à ce que leurs sujets israélites bénéficient d’un privilège de juridiction et soient jugés par leurs rabbins conformément à leur loi mosaïque. Cela ne devait concerner que les litiges d’ordre religieux ayant trait aux statuts personnel et successoral. D’autres litiges civils, comme le commercial, pouvaient également être réglés par les juridictions rabbiniques à condition qu’aucun musulman ou étranger n’y soit impliqué. Les sentences et les actes notariés étaient alors rédigés en hébreu. Ce qui faisait de cet idiome, de facto, une langue officielle au Maroc, puisque, dans certains cas, les officiels marocains, dont les caïds et les pachas par exemple, devaient en tenir compte.
Une justice communautaire
Les rabbins jugeaient leurs coreligionnaires, mais ils exerçaient également une étroite surveillance sur les pratiques religieuses de leur communauté, contrôlant par exemple l’abattage rituel et le comportement social de leurs ouailles. Jusqu’à l’instauration du Protectorat français, la portée et la validité des jugements émis par les rabbins dépendaient de leur prestige personnel.
Par Younes Messoudi
Lire la suite de l’article dans Zamane N° 87