Tout le monde s’accorde à penser que notre Antiquité n’a pas reçu toute l’attention qu’elle mérite. Les historiens maghrébins traditionnels l’avaient tout simplement ignorée. Les historiens français de l’époque coloniale l’avaient transformée en champ de bataille pour légitimer la colonisation. Et ce n’est que récemment que les Maghrébins ont commencé à revendiquer cette partie lointaine de leur passé.
On serait étonné aujourd’hui de constater que le célèbre historien marocain Ahmad Ibn Khalid Naciri, en consacrant une œuvre monumentale à l’histoire du Maroc, avait choisi l’avènement du prophète Mohammed comme le commencement de cette histoire. Comme si les “siècles obscurs” de la Jahiliya qui précèdent l’islam ne méritaient pas d’être mentionnés. Aborder la place de l’Antiquité dans l’historiographie islamique du Maghreb revient à évaluer le statut qu’occupent les Berbères chez les historiens maghrébins de la période médiévale, ainsi que le jugement qu’ils portent sur la résistance berbère à la conquête arabo-musulmane. Pour ces historiens, l’islam est venu délivrer les habitants d’Afrique du Nord de l’ignorance et du polythéisme qui dominaient pendant la période antéislamique. La colonisation romaine qui, pour l’historien Emile-Félix Gautier, deviendra une ère de civilisation et de lumières, n’était pour les historiens comme Ibn Khaldoun qu’une sombre étape de domination par les roum. Contrairement aux historiens orientaux des premiers siècles de l’ère islamique qui avaient tendance à mépriser les Berbères, le livre des « ‘Ibar » d’Ibn Khaldoun peut être considéré comme une apologie pour ces derniers et une tentative de corriger une perspective dévalorisante qui avait longtemps caractérisé la littérature historique du Machrek.
Par Mohamed El Mansour
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