En tant que pratique religieuse, le jeûne est un phénomène universel qu’on trouve dans toutes les religions monothéistes. Bien plus, il semble que toutes les sociétés humaines l’aient connu sous des formes diverses, bien avant l’avènement des grandes religions.
Selon les anthropologues, le principe du jeûne a été connu par toutes les sociétés à des degrés divers de civilisation, même celles qu’on appelle “primitives”. Ainsi, le Finlandais Edward Westermarck, qui a mené des études approfondies sur le Maroc du début du XXème siècle, comme sur d’autres sociétés à travers le monde, est arrivé à la conclusion que le jeûne serait intimement lié à l’idée de l’impureté de la nourriture, qui connaît une altération dès qu’elle dépasse la bouche, et la tentative de l’homme de se purifier comme moyen de satisfaire les divinités, surtout pendant des périodes considérées comme sacrées. Un ventre plein serait synonyme de souillure selon certaines croyances. Au Maroc, fait remarquer Westermarck, certaines formules de magie populaire doivent être exécutées tôt le matin avant que le jeûne ne soit rompu. Dans l’Egypte ancienne, Hérodote nous dit qu’il était de coutume de jeûner à la veille d’un sacrifice à Isis. À mentionner également, en relation avec cette croyance, le fait de maintenir l’offrande, homme ou animal, dans un état d’abstinence en préparation au sacrifice. Westermarck rapporte aussi que, au Maroc, il est de coutume de jeûner le jour qui précède l’Aïd Al Adha et d’éviter de nourrir l’animal à sacrifier pour quelque temps avant le sacrifice.
Parmi certaines populations du Maroc, écrit Westermarck, la coutume veut que les gens s’abstiennent de manger pendant toute la journée quand il y a un décès dans le village, alors que si le même décès survient pendant la nuit, les gens ont l’habitude de consommer la nourriture normalement sans aucune restriction. Et cette coutume, qu’on observe toujours aujourd’hui chez nous, et qui consiste à s’abstenir de cuisiner tant que durent les funérailles ? Ceci ressemble étrangement aux coutumes des peuples qu’on trouve à des milliers de kilomètres de chez nous. Ainsi, en Polynésie, il est interdit de manger sous le toit d’une maison où se trouve encore la dépouille de la personne décédée.
Par Mohamed El Mansour
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