55 ans après la terrible soirée du 29 février 1960, les survivants d’Agadir traînent encore ce cauchemar comme une malédiction. El Haj Ali, 80 ans aujourd’hui, qui vit toujours à Agadir, rouvre pour Zamane la boîte de Pandore. Un témoignage émouvant.
«J’avais 25 ans ce fameux 29 février 1960. Je suis né et vis toujours dans la ville d’Agadir. Je me souviens de ce mois déjà très particulier. D’habitude, la ville est fraîche en cette saison, mais ce n’était vraiment pas le cas cette année. Au contraire. Durant plusieurs jours, une surprenante canicule a sévi. Les habitants et les touristes se pressaient tous les jours aux abords des plages. Etant moi-même ingénieur hydraulique, je trouvais cette situation bien peu banale et même inquiétante. C’est ainsi donc que la soirée du 29 ressemblait à une soirée estivale. Pour le célibataire comme je l’étais à l’époque, le moment était propice aux sorties entre amis. C’est donc accompagné d’un copain que je me suis rendu au cinéma Marhaba pour y voir un film avec Elvis Presley à l’affiche. La séance s’est achevée au-delà de 23 heures. Comme il faisait encore très doux, nous avons décidé de poursuivre la soirée en allant siroter un café en terrasse. Vers 23h30, j’ai vécu une scène qui restera a jamais gravé dans ma mémoire. Alors que je plongeais mon sucre dans mon verre et que je m’apprêtais à touiller, un terrible grondement s’est fait ressentir. La terre a tremblé. Nous sentions le sol se dérober à nos pieds comme si nous étions sur un tapis roulant très puissant. Pendant quelques secondes, le chaos était absolu. Les cris humains se mêlaient au terrifiant grondement de la terre. A ce moment, même si nous étions plutôt habitués à ressentir des secousses, l’idée d’un séisme ne m’est pas venue automatiquement tellement celui-ci était puissant. Je n’avais aucun doute, c’était la fin du monde».
Par Sami Lakmahri
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