Quelles traces le sultan Ben Youssef a-t-il laissé à Madagascar durant son célèbre exil ?Qu’en pensent les habitants de cette lointaine île du Pacifique, dont l’avis a finalement peu été requis ici au Maroc. Le professeur Frédéric Garan, basé sur l’île voisine de La Réunion, a enquêté sur place sur cet important épisode de l’Histoire du Maroc. Il décrypte pour nous la mémoire de cet évènement et nous révèle d’étranges analogies du récit colonial entre les deux pays, tous deux sous l’emprise de la France. Regards et destins croisés…
Vous êtes professeur d’Histoire à l’université de la Réunion, comment vous êtes-vous intéressé au personnage de Mohammed V et de son exil à Madagascar ?
C’est une histoire très intime pour moi. En 1993, j’ai eu la chance d’obtenir un poste de professeur d’Histoire au lycée Lyautey de Casablanca dans lequel j’ai enseigné durant six ans. C’est ce qui m’a permis de découvrir et de travailler sur l’Histoire du Maroc, en particulier son histoire coloniale, ma spécialité d’origine. Le hasard a fait ensuite que j’obtienne un poste à Madagascar en faisant tout de suite le lien avec l’épisode de l’exil du sultan Ben Youssef et de sa famille sur l’île. J’ai donc souhaité profiter de cette occasion pour travailler un peu plus en détail sur ce chapitre, pour en faire d’ailleurs mon premier travail universitaire et devenir maître de conférence à l’université de la Réunion.
Lorsque vous arrivez à Madagascar, quel constat faites-vous à propos de la mémoire de Mohammed V sur place ?
J’arrive au milieu des années 2000 et, très honnêtement, la population malgache ne se souvient pas forcément de l’épisode de l’exil de la famille royale marocaine. Pour retrouver une trace de ce passé, il faut se rendre dans la ville d’Antsirabé, la même qui avait accueilli le sultan Ben Youssef. Cette mémoire est conservée aussi physiquement, par exemple autour de la mosquée de la ville, entretenue régulièrement par les soins du Maroc.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’interview dans Zamane N°146