Pendant des siècles, entre le XIVème et le XVIIIème siècles, plusieurs cités et localités portuaires marocaines vivent principalement de course et de piraterie.
On peut citer parmi ces villes Tétouan, Salé, Rabat, Larache, Maâmora… Il s’y établit donc une sorte d’économie de guerre assez pérenne. Ces villes marocaines, et bien d’autres situées plus au sud sur la côte atlantique, faisaient partie d’un phénomène socio-économique et culturel multiséculaire qui n’existe pas seulement au Maroc. Mais également, pour se limier à l’Afrique, sur tout le pourtour sud-méditerranéen. Ainsi, des villes comme Alger, Tunis et Tripoli ont dans le monde entier une réputation aussi sulfureuse, sinon plus, que Tétouan et Rabat. Il s’agit d’une réalité humaine et matérielle dont l’existence s’enracine profondément aussi bien dans une géographie particulière (souvent des sites côtiers naturellement protégés, voire imprenables) que dans une histoire à la fois longue et troublée. Cette réalité donne naissance, inévitablement, à une société qui a ses propres valeurs. Mais aussi des traits distinctifs sur le plan de sa composition ethnique et de sa stratification sociale. C’est ce que nous proposons d’appeler une «formation corsaire», ou, pour utiliser un autre terme, «une société corsaire». Nous allons essayer de décrire les différentes composantes ethniques et religieuses d’une telle société en faisant de l’agglomération Rabat-Salé notre cadre de référence. Car c’est l’un des centres corsaires les mieux étudiés, du moins dans les deux langues académiques dominantes au Maroc, arabe et français.
La société corsaire se distingue par une formation sociale à la fois diversifiée et cosmopolitique. C’est une société ethniquement bigarrée. Juste par commodité, nous allons la diviser en deux grandes composantes. L’une d’origine exogène et l’autre indigène.
Par Maâti Monjib
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