La crise actuelle fait abonder les comparaisons avec l’Histoire. Dans le domaine de l’économie, c’est le spectre de la crise de 1929 qui revient hanter le monde. Au Maroc, cette année coïncide avec la création de la Bourse de Casablanca…
Son année de naissance n’augure pourtant rien de bon. La bourse de Casablanca est ouverte en 1929, année du plus grand cataclysme économique de l’histoire moderne. Alors que le monde est plongé dans la première démonstration des ravages du capitalisme, les grandes banques privées implantées au Maroc sous le Protectorat s’organisent. Elles créent donc l’Office de compensation des valeurs mobilières, ancêtre de la place boursière marocaine. La structure encore rudimentaire ne pèse pas encore assez lourd face à l’accroissement du marché des valeurs mobilières et l’instauration progressive du contrôle de change. A cette époque, les colonies d’Afrique du Nord, le Maroc en particulier, sortent paradoxalement d’une phase de «boom» économique marquée par l’essor des activités minières, industrielles, agricoles, et un afflux important des capitaux privés. Une embelli rapidement anéantie par les effets de la «Grande dépression», qui atteint de plein fouet l’exportation marocaine, sujette au cours des prix mondiaux. Une tendance qui n’arrange rien à l’économie marocaine qui souffre d’une balance commerciale déjà défavorable. En effet, les exportations coûtent moins cher que les importations. Lorsque les cours mondiaux du phosphate et du blé chutent, la richesse naturelle de l’empire chérifien ne pèse pas lourd. Face aux grondements des colons, le Protectorat essaye tant bien que mal de réagir. Des réformes sont engagées par la Métropole avec plus ou moins de succès. Mais les grands oubliés sont les Marocains, ruraux et citadins, qui encaissent la crise plein fouet. Exode rural, paupérisation des masses et épisodes de famine en attestent. Si la «Grande dépression» entraîne le monde, doucement mais sûrement, vers le plus violent conflit de l’histoire de l’humanité, elle suscite également au Maroc une vague de mécontentement qui inaugure les premiers mouvements nationalistes. Alors que la résistance armée s’essouffle, une autre forme de combat anticolonial voit le jour. Quant à la Bourse de Casablanca, les autorités du Protectorat réforment la place casablancaise qui devient, en 1948, l’Office de Cotation des Valeurs Mobilières. Il faut attendre bien après l’indépendance, pour voire apparaître une version modernisée de la bourse de Casablanca qui devient, en 1967, juridiquement et techniquement organisée. Depuis, elle est la place forte financière du royaume et renforce le statut de capitale économique attribué à Casablanca.