Le dimanche 19 novembre 1911, le «Petit Journal» publiait une gravure en couverture. L’image en couleur était affublée d’une légende historique : «La France va pouvoir porter librement au Maroc la civilisation, la richesse et la paix»…
La gravure est célèbre et plusieurs marocains la publient sur les réseaux sociaux, se la partagent, la commentent sans souvent prendre le temps de s’arrêter sur la date. En fait, le journal célèbre un événement où les Allemands et les Français avaient signé un accord, un traité officiel, le 4 novembre 1911 à Berlin, où le pays germanique laissait les mains libres à la France au Maroc. Cet accord venait couronner un processus de lutte entre les deux nations européennes qui se disputaient le Maroc. Cette stratégie se plaçait dans un contexte que le XIXème siècle marocain a vu s’imposer à lui. Le commerce avec le Maroc avait repris, depuis la défaite contre l’Espagne en 1860 et surtout après que le Sultan Mohamed ben Abderrahmane eut cédé en concluant le traité de 1856 avec l’Angleterre. Cet accord ouvrait une brèche définitive dans ce que les européens appelaient «la fermeture du pays aux étrangers», par l’établissement de la liberté commerciale et par une tarification douanière très stricte. Il mettait fin à ce que les sources européennes appelaient «la fantaisie des sultans» qui avaient jusqu’alors, selon les mêmes sources, agi à leur guise, «tantôt modifiant le montant des droits de douane, tantôt prohibant l’importation ou l’exportation de certains produits».
Une manière de dire que le Maroc était déjà passé sous tutelle économique. La brèche était, en fait, cette grosse rançon que le sultan devait payer à l’Espagne après la défaite de Tétouan en 1860 et que des banques anglaises lui avaient prêté la somme sous l’impulsion de la couronne britannique.
Par Moulim El Aroussi
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