Pourquoi les destins du Maroc et l’Espagne sont-ils finalement si liés ? Dans son nouvel opus «L’autre Espagne», l’écrivain Mohamed Larbi Messari, à travers des siècles de l’histoire, revient sur la saga des relations maroco-espagnoles.
Le Maroc aurait été pour l’Espagne, pour paraphraser l’écrivain espagnol Jorge Semprun dans son célèbre roman Le mort qu’il faut, l’ennemi qu’il faut, indispensable dans la phase de reconstruction nationale et identitaire. Il a longtemps rempli ce rôle depuis les guerres de la Reconquista. L’expulsion des Morisques devait servir d’exutoire à ce qui est considéré par une bonne partie de l’Espagne comme un viol, la conquête de Tarik Ibn Ziyad. Larbi Messari, dans un livre savamment documenté et superbement écrit, analyse les facettes de L’autre Espagne, titre de son livre. Il y est question de ce tournant de l’histoire contemporaine de l’Espagne, la transition démocratique dont les architectes furent à coup sûr le roi Juan Carlos et le Premier ministre Adolfo Soares et Felipe Gonzales, avec des parrains comme l’Europe et l’Amérique, et une classe moyenne forte dans le pays. Mais c’est plutôt le rapport au Moro qui interpelle le plus dans le livre de Messari. Aucun pays n’a autant marqué l’Espagne que le Maroc. Le XXe siècle espagnol est marocain. Les péripéties de la Guerre du Rif précipitèrent la République et les Phalanges marocaines sous la houlette de Franco y mirent fin. Au XIXe, déboutée de ses colonies en Amérique Latine et aux Caraïbes, l’Espagne s’exerça à un exercice de reprise de fierté nationale contre le Moro, qu’elle défit à Tétouan, en 1860. Toutes les villes devaient, dans un regain de nationalisme, avoir une rue qui porte le nom de cette « victoire » : Tetuan. Vue par les Tétouanais, l’entrée des Espagnols à Tétouan est ressentie comme une deuxième chute de Grenade. Une longue épitre en poésie arabe classique du jurisconsulte Afailal qui retrace les tourments de ses habitants, est encore dans les bouches, jusqu’à aujourd’hui.
Par Hassan Aourid
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