Marabouts, sources d’eau, zaouias, pouvoir surnaturel, etc. Le culte de la baraka a fait naître, surtout dans le milieu tribal, bien des légendes.
Nous partons pour Sidi Rahal à deux heures trois quarts : la zaouia de ce nom n’est qu’à dix-huit kilomètres environ, et c’est un des objets de notre voyage qui nous attirent le plus. L’année dernière, dans les Abda, nous avions recueilli de la bouche d’une femme de cette zaouia, les informations les plus singulières. On savait depuis longtemps que les femmes de la zaouia de Sidi Rahal étaient connues pour leur légèreté de mœurs ; mais il ressortait des renseignements de notre informatrice que ces dérèglements étaient liés pour ainsi dire à la baraka, c’est-à-dire à la «bénédiction» du saint : en un mot, il semblait qu’ils constituassent une pratique d’un caractère presque sacré. D’abord Sidi Rahal est l’ancêtre ; il a donc un caractère à la fois religieux et héroïque : le culte des saints et le culte des héros se confondent ici. C’est précisément ce caractère de sainteté ajouté à la conception héroïque qui fait la supériorité de notre légende sur une légende païenne, en lui donnant une teinte générale de moralité. Car le saint est, comme le héros, un homme fort et puissant, mais il est de plus un homme juste, craignant Dieu, aimant son prochain et montrant par son ascétisme qu’il méprise sa propre existence. La haute situation qu’il occupe ainsi dans l’échelle des êtres humains garantit aux yeux de tous l’efficacité de la baraka qu’il a transmise à ses enfants; sa sainteté a imprégné toute sa descendance et l’a fait participer aux dons surnaturels de l’ancêtre. La légende célèbre cette baraka et la préoccupation d’en établir l’indiscutable puissance a fortement contribué à faire éclore plusieurs de ces épisodes.
Par Edmond Doutté
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