Il y a 40 ans, en août 1980, naquit en Pologne, aux frontières de l’empire soviétique communiste, le grand mouvement pacifique «Solidarność» (Solidarité), auquel près d’un Polonais sur trois a adhéré, et qui en conséquence comptait plus de 10 millions de membres. Ce fut, en terme de nombres de membres, le plus grand syndicat du monde.
«Solidarność» était le fruit des rêves, des souffrances et des actions des Polonais, en commençant par soldats du soulèvement anticommuniste des années 1940 jusqu’aux participants des révoltes anticommunistes polonaises de juin 1956, mars 1968, décembre 1970 et juin 1976.
Le rôle de l’Église catholique, et plus particulièrement du pape Jean-Paul II ainsi que son premier pèlerinage en Pologne en 1979, furent d’une importance capitale pour «Solidarność» et de son caractère pacifique.
En 1980, la «Solidarność» polonaise fut l’étincelle qui provoqua l’effondrement de l’empire soviétique et des États communistes qui en dépendaient sur quatre continents. Le monde façonné par la guerre froide après 1945 s’effondra. De nombreux pays furent libérés de la dépendance et de l’occupation de l’Union soviétique – la Roumanie, la Tchécoslovaquie, la Hongrie jusqu’à la Géorgie. Grâce à ce tournant initié par «Solidarność», la réunification de l’Allemagne fut également devenue possible.
Ce fut l’augmentation des prix de la viande, qui a provoqué une grande indignation et qui fut la cause immédiate de la grande vague de grèves de l’été 1980. Endormis par leur propre propagande de succès et de prospérité, les communistes n’avaient pas pris en compte l’ampleur du mécontentement de la société polonaise, en proie à la crise économique qui s’aggravait depuis plusieurs années.
Ce mécontentement a déclenché dès les premiers jours de juillet 1980 des grèves salariales ponctuelles dans l’est de la Pologne. Celles-ci se sont soldées par un succès inattendu et ont abouti à la signature d’accords écrits avec les grévistes. C’étaient les premiers événements de ce genre depuis l’imposition du communisme à la Pologne en 1944.
Mais le point de non-retour furent les grèves sur la côte polonaise. Le déclenchement de la grève au chantier naval de Gdańsk était dû au licenciement, peu avant sa retraite, d’Anna Walentynowicz, une ouvrière estimée et honnête, qui avait vivement critiqué l’injustice de la réalité communiste, en particulier la pauvreté des ouvriers.
Ses amis des Syndicats Libres illégaux décidèrent d’organiser, pour la défendre, une grève au chantier naval de Gdańsk qui éclata le 14 août 1980. La grève fut menée par Lech Wałęsa, licencié quatre ans plus tôt et arrivé ce jour-là au chantier naval.
Le 15 août, les chauffeurs de bus et de tramway se joignirent à la manifestation, suivis par les usines de Gdynia, Gdańsk et d’autres villes de la côte polonaise. Le 18 août, le chantier naval de Szczecin se mit en grève, et trois jours plus tard, la grève s’étendit à tout le pays, y compris aux mines et aux grandes usines industrielles du sud de la Pologne.
Le 23 août, le gouvernement communiste entama des pourparlers avec le Comité interentreprises de grève de Gdańsk, à la suite desquels il accepta de céder à toutes les revendications des grévistes, y compris la création de syndicats libres indépendants des autorités. Des accords avec les grévistes furent signés d’abord à Szczecin, le 30 août, puis le 31 août à Gdańsk.
Le 17 septembre des représentants des ouvriers de toute la Pologne créèrent, à Gdańsk, le syndicat indépendant et autonome «Solidarność».
16 mois plus tard, le général Jaruzelski, sous la pression de l’Union soviétique, introduisit la loi martiale en Pologne et arrêta des milliers de militants de «Solidarność». «Solidarność» entra dans la clandestinité, s’opposa pacifiquement à la terreur communiste et après 7 ans obligea les autorités d’accepter les pourparlers qui ont abouti aux accords de la «table ronde».
Les candidats de «Solidarność» l’emportèrent aux premières élections présidentielles libres du 4 juin 1989. Le premier gouvernement non communiste depuis 45 ans fut établi avec Tadeusz Mazowiecki en tant que président. La première pièce du domino de l’empire communiste s’écroula. Peu de temps après nous assistions à l’effondrement du «mur de Berlin». La Roumanie, la Tchécoslovaquie, la Hongrie et d’autres pays du bloc communiste ont retrouvé leur liberté …