Mohammed Bensaïd Aït Idder est le seul leader de parti politique à avoir pris fait et cause pour le mouvement du 20 février. Le vieux résistant n’a pas renoncé à transmettre le flambeau de la révolution.
«Je vous salue, jeunes du Maroc, bâtisseurs de la citoyenneté avec fierté et respect, ce peuple est le vôtre, ce Maroc est votre pays, menez-le au bel agir, conduisez-le vers l’espoir». Cette phrase est la conclusion de la lettre du résistant historique Bensaïd Aït Idder, adressée aux jeunes du mouvement du 20 février. Il fallait attendre le représentant d’une génération du passé, celle qui a lutté, mais pas forcément vaincu, pour (enfin) transmettre l’espoir. Le «zaïm» du PSU (Parti socialiste unifié) s’engage corps et âme dans ce qui semble être son ultime bataille. Dimanche 13 mars, le sombre jour où des militants du mouvement du 20 février ont goûté à la matraque des forces de l’ordre, c’est lui qui, devant le siège de son parti, a fait don de sa personne, pour rétablir une médiation, depuis longtemps ignorée. Pour une jeunesse prise soudainement de conscience politique, Bensaïd Aït Idder est devenu un symbole. Et pour cause, pour toute bataille, il faut du courage. Une qualité rare chez nos hommes politiques, mais qui n’a jamais manqué à Aït Idder. Condamné à mort en 1963 pour «complot contre la monarchie», il s’exile en France. A son retour en 1981, ce militant acharné ne connait toujours pas le sens du verbe «s’assagir».
Le seul à avoir parlé de Tazmamart
Quelques années plus tard, il interpelle directement le tout puissant Driss Basri concernant le célèbre mouroir de Tazmamart. Ennemi de la fitna, Aït Idder a toujours prôné l’union de la gauche. Un vieux soldat sait que l’adage «l’union fait la force» n’est pas qu’une vaine formulation. C’est dans l’union des jeunes du Maroc, marchant le 20 février et le 20 mars derrière les mêmes pancartes et les mêmes revendications, que le leader puise ses espoirs d’un vrai changement démocratique. A 86 ans, après des années de combats, Aït Idder a le flair pour reconnaître les prémices d’une révolution. A défaut d’être le pilote, il est la boussole d’une génération qui sait aujourd’hui quelle route emprunter. Désormais, et quelle que soit l’issue du combat pour la démocratie, le pouvoir devra faire face non plus à un, mais à des milliers de Aït Idder.
Par Sami Lakmahri