Le phosphate raconte une autre histoire du Maroc et du Protectorat, qui passe par les appétits des créanciers, les explorations scientifiques, la création d’infrastructures modernes, de villes ouvrières… et de foyers syndicalistes. Rétrospective.
Le Maroc n’est pas un pays pétrolier mais phosphatier. Le phosphate est son or. Certains l’appellent le pétrole du pauvre, mais ils ont tort. Ce produit est l’artère nourricière de toute l’économie du royaume. Mais il est aussi autre chose. Jetons un coup d’œil à l’histoire marocaine. Le Protectorat, nous ne le savons que trop bien, a d’abord été une histoire de gros sous. L’économie. La finance. Les banques. Les guerres perdues par le royaume dans le XIXème siècle, son instabilité politique chronique, son incapacité à relever la tête : tout cela a transformé le territoire marocain que l’on appelait encore, avec une pointe d’ironie, «l’empire chérifien», en vache à lait. Il fallait le traire. Il fallait l’explorer, le labourer, le tourner et retourner dans tous les sens. La pénétration européenne, qui avait commencé depuis des décennies déjà, saisissait une occasion en or pour légitimer son entrée «par la grande porte» : puisque le royaume était incapable de payer ses dettes (dont l’essentiel était consécutif à ses cuisantes défaites militaires), il fallait le pénétrer totalement pour essayer de se servir sur place. Pour légaliser l’entreprise, et l’inscrire dans les limites tracées par le Droit international, rien de mieux que le traité du Protectorat.
Par Karim Boukhari
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