Retour sur un livre mêlant «objectivité scientifique et propagande coloniale» et qui constitua, au moins aux yeux des Européens, la plus grande référence en matière d’écrits historiques du (et sur le) Maroc entre le XVIème siècle et le début du XXème.
Dans sa nouvelle édition parue en 2002 chez Maisonneuve & Larose, «Les Historiens des Chorfa» de Évariste Lévi Provençal est présenté comme une simple somme d’informations. Le rédacteur de sa préface, Bernard Rosenberger, s’est vu dans l’obligation de préciser dès l’ouverture du livre: «Le voici réédité. Fallait-il le faire ? On dira que bien des informations qu’il contient sont aujourd’hui obsolètes, et que paraîtront contestables bien des jugements marqués du sceau de son époque et du milieu colonial qui l’ont vu naître». Il évoque même la possibilité de corriger les torts du texte car, dit-il, plusieurs documents qui remettent en cause les affirmations de l’auteur ont été découverts depuis. Mais, se ravise-t-il, le livre contient une grande somme d’informations qui ne manqueraient pas d’être utiles, surtout aux chercheurs dont les susceptibilités ont pu être atténuées par le temps. Or, ce qui fait la force du livre est moins la somme d’informations ainsi que la dense touffe de références qui assiègent le texte, mais bien la thèse qu’il épouse et qu’il défend en la faisant sienne, à savoir que «les Marocains souffrent d’une tare, celle de ne pas écrire leur histoire».
Par Moulim El Aroussi
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