Entre le XVIème et le XVIIIème siècle, les renégats du Maroc ont largement contribué à la modernisation de l’armée. À cette époque, ils jouissent d’un statut qui leur permet même de poser les premiers jalons d’un État centralisé. Un rôle confiné dans les secrets de l’Histoire.
Les renégats sont sans conteste les mal-aimés de l’historiographie marocaine. Pour ces hommes ayant renoncé à leurs racines, nul droit à la rédemption. Si, pour les Marocains, ces guerriers se sont finalement rangés à l’Islam, il n’en demeure pas moins des «roumis» d’origine. Les chroniqueurs occidentaux, quant à eux, n’expriment que du mépris pour des hommes qui ne sont à leurs yeux que des traîtres. De fait, peu d’historiens se sont penchés de façon minutieuse sur les fonctions militaire et administrative d’une catégorie d’hommes trop rapidement écartés des premiers rôles de l’Histoire. Pourtant, leur apport dans l’édification d’un État moderne est une réalité. Leur expertise a en effet impacté d’une manière significative le fonctionnement du Makhzen. Sans toutefois le reconnaître, le pouvoir marocain de l’époque ne se prive pas pour tirer un maximum de profits de ses ex-potentiels ennemis. Aujourd’hui, l’industrie du spectacle tend à policer l’image du renégat. Dans la réalité, un renégat est un déraciné, souvent traqué par les siens et obligé de s’intégrer à un monde dont il est étranger.
Par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’article dans Zamane N°41