Les rapports entre Rabat et Nouakchott se réchauffent progressivement au cours des années 1990. Mais la relation ne devient vraiment fusionnelle qu’après les coups d’Etat de 2005 et 2008, qui bouleversent l’échiquier local et international.
De 1991 à l’an 2000, après avoir appuyé Saddam Hussein dans le Golfe et avoir acquis l’image d’un régime raciste dans le contexte du conflit du fleuve Sénégal, Nouakchott connaît une traversée du désert diplomatique. Au sortir de ce purgatoire, l’économie d’importation (le recyclage des devises issues de l’exportation du fer de Zouerate) parvient, au prix de terribles restructurations et d’un violent exode rural, à restaurer la confiance des investisseurs. Le conflit du Sahara semble alors en voie de résolution.
Les rapports du président Maaouiya Ould Taya avec la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) relèvent d’une ambivalence entre alignement politique pro-occidental, favorable au Maroc, et les liens forts entre la tribu Smassid (dont est issu Ould Taya), la tribuRgueibat (qui domine le Polisario) et le monde des affaires de Nouakchott. Le colonel Moulay Ould Boukhreis a longtemps symbolisé cette symbiose RASD-Nouakchott, étant lui-même Rgueibat et chef d’état-major mauritanien. Sous le «règne» de Ould Taya, les grands clans de l’Adrar et du Sahara, liés à sa famille, acquièrent la maîtrise de la sphère économique. Ainsi, ses propres contribules Smassid contrôlent les deux plus grandes entreprises nationales, le consortium MAOA-Ould Abdoulaye et le groupe de Abdellahi Ould Nouegueid. Ce dernier est l’un des plus riches entrepreneurs du pays. Smassid comme le président, il est aussi le principal financeur du parti officiel, le Parti républicain démocratique social (PRDS). Il représente l’aile pro-marocaine des affairistes sahraouis et possède de solides relais aux Canaries, au Sénégal, en Gambie, à Bissau et bien sûr au Maroc. En 2000, il ouvre une succursale à Dakhla et participe, en tant qu’actionnaire de Maroc Telecom, à l’entrée dans le capital de Mauritel. Il est aussi l’allié de Ould Derhem, ce «Sahraoui marocain» supposé proche de la famille royale, dans une affaire de pêcheries de poulpe contrevenant aux directives du ministère marocain de la pêche.
Par Simon Pierre
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