Dans toutes les sociétés, les grandes familles ont joué un rôle déterminant dans l’Histoire. Mais la particularité du Maroc, ou plutôt du Makhzen, est de les avoir érigées en véritables institutions de pouvoir. Qui sont-elles ? Comment sont-elles nées ? Comment se sont-elles hissées et maintenues au rang d’élites ? Zamane a exploré les albums de famille, de leurs origines à nos jours, pour tenter d’apporter des réponses sociales, politiques et économiques à ces questions. Le commerce a fait naître de grandes dynasties, qui tantôt ont côtoyé les arcanes du pouvoir, à l’instar des Fassis, tantôt s’en sont prudemment tenues à distance, comme les Soussis. De même, de grands savants religieux ont choisi de s’associer ou de s’opposer au Makhzen.
Contrairement aux apparences, notre connaissance de l’histoire de la famille marocaine est encore très approximative. Vu que les historiens se sont d’abord intéressés à l’histoire politique et à l’histoire sociale du politique, le pouvoir visible ou occulte d’une constellation de grandes familles apparaît comme une tendance lourde de l’histoire marocaine. Ceci dit, pour mieux comprendre le phénomène, il faudrait restituer sa complexité et le situer dans différents processus socio-historiques. Le XIXe siècle est un lieu d’observation particulièrement révélateur, car il permet en même temps de saisir des continuités et de repérer des mutations décisives qui, du fait de la pénétration économique européenne, ont marqué la société marocaine au-delà de cette époque : ces mutations auront un impact sur la période du protectorat et même sur le temps postcolonial.
Portraits de (grandes) familles
Dans les campagnes, une grande famille est celle qui détient le commandement, fondé sur la supériorité militaire. On a même parfois avancé que l’émergence d’un nom de confédération de tribus est souvent synonyme de l’émergence d’un clan particulièrement fort, dominé à son tour par une grande famille. C’est ainsi qu’au XIe siècle, avec la geste des nomades Sanhaja, on relève la prééminence des Guddâla, Nafûssa et Lamtûna. Ce sont ces derniers qui ont pris le pouvoir sultanien, et plus particulièrement le clan des Banû Turghut, auquel appartient Youssef Ibn Tachfine.
Par la rédaction
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