En août 1953, la famille royale est exilée en Corse puis, après, à Madagascar. Beaucoup de Marocains ne connaissaient pas grand-chose de cette île du Pacifique, qu’ils appelaient « Madame Casacar ». Cet exil marquera les mémoires puisque c’est en retournant de Madagascar que Sidi Mohammed Ben Youssef, qui n’est pas encore Mohammed V, fera définitivement son entrée dans la Grande Histoire, signant la libération du royaume mais aussi le couronnement de la lute nationaliste. Plus célèbre que l’autre exil de la famille royale, cette fois en Corse, la parenthèse malgache est aussi célèbre que méconnue. Que s’est-il réellement passé à Antsirabé et pourquoi ? Qu’y a-t-il eu avant, après, et surtout pendant ?
En plus de la dimension politique, Zamane a mené l’enquête pour revenir aussi sur l’aspect psychologique, personnel, humain, de cet éloignement forcé d’une petite famille pas comme les autres.
L’atmosphère est martiale au palais royal de Rabat en cette après midi du 22 aout 1953, pourtant jour de l’Aïd el Kébir. Lorsque le général Guillaume débarque dans l’enceinte du Méchouar pour signifier au sultan Ben Youssef qu’il sera expulsé de son propre pays, une demi-douzaine d’engins blindés l’accompagne. Trois tanks surmontés de mitraillettes et de nombreux cars de police complètent ce dispositif pour le moins intimidant.
L’entrevue entre le Résident Général et le sultan chérifien est expéditive. Elle ne dure que 45 minutes et vient confirmer que l’heure n’est plus au dialogue. Dans la foulée, le monarque marocain est invité, en toute hâte, à rassembler quelques affaires personnelles et avertir sa famille proche que le départ est imminent. Vers 15h, le cortège royal arrive en trombe au terrain d’aviation militaire de Rabat-Ville.
L’agressivité des Français ne retombe toujours pas. L’illustre souverain est embarqué dans un avion militaire d’ordinaire réservé aux parachutistes. Assis péniblement sur les bancs en bois qui longent la carlingue du DC3 de l’armée française ; la famille royale éprouve un vol de plus de six heures. L’abattement des occupants fait écho à l’insupportable bruit des moteurs de gros porteur militaire, qui ne cessent leur vacarme qu’une fois arrivés au bout de la piste de l’aéroport de Campo-del-Oro d’Ajaccio.
Par la rédaction
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