Président du conseil des oulémas, ministre de la Justice puis conseiller du roi Mohamed V, Mohamed Belarbi Alaoui (dit Cheikh Al Islam) a cultivé durant toute sa vie une modernité et indépendance d’esprit certaines, n’hésitant pas à soutenir des causes comme celle de Abdelkrim Khattabi ou la gauche. Parcours d’un salafiste «atypique».
Il ne reste, dans l’imaginaire collectif de la figure religieuse et politique de Mohamed Belarbi Alaoui, que cette image de patriarche entouré des jeunes-turcs marocains : Benbarka, Bouabid, Fqih Basri, Youssoufi, prenant position contre le projet de Constitution de 1962. La trajectoire politique de Belarbi ne peut être réduite à cela, mais seule cette image persiste et éclipse toutes les séquences de sa vie. Qu’était ce grand témoin de son temps ? La tâche n’est pas aisée, parce que le patriarche n’a pas écrit, et il faut faire un travail d’archéologue pour reconstituer sa vie.
Nous savons qu’il est né en 1880, dans un hameau de ces chapelets de ksours qu’est Mdaghra, sur les rives du Ziz. Mdaghra a une longue histoire de savoir et elle compte moult zaouïas et medersas. Elle était, quelques années avant la naissance de notre homme, un foyer du jihad contre la pénétration française, mené par un certain Sidi Mohamed Darkaoui. Quand le jeune Mohamed quitte sa Mdaghra pour parfaire sa formation à l’université d’Al Quaraouiyine à Fès, il porte avec lui cette tradition de savoir que dispensait Mdaghra, mais aussi une conscience politique. Il est encore sous l’emprise d’une culture mystique, celle qu’il avait emmenée avec lui de sa Mdaghra natale. Au même moment où il faisait ses études, un jeune rifain du nom de Mohamed Ben Abdelkarim Khattabi fréquentait la prestigieuse université. Se sont-ils connus ? Rien ne l’étaie.
Par Hassan Aourid
La suite de l’article dans Zamane N°33